Certains défenseurs des droits des communautés LGBTQ+ au Québec s’inquiètent… de ce qui se passe aux États-Unis.

Au cours des derniers jours, ils ont, dans divers médias, fait état de leurs craintes dans la foulée d’un des – trop nombreux – jugements controversés rendus par le plus haut tribunal du pays de l’oncle Sam.

C’est que la Cour suprême a donné raison à une Américaine du Colorado qui refusait de créer un site web, en raison de ses convictions religieuses, pour le mariage d’un couple homosexuel. Le tribunal a autorisé la discrimination sur la base de l’orientation sexuelle en invoquant le premier amendement à la Constitution américaine, qui protège la liberté d’expression.

Ce n’est pas tant qu’une décision similaire soit rendue au Québec à court terme qui inquiète les défenseurs des droits des communautés LGBTQ+ pour l’instant.

Même si ce genre de verdict n’est pas inconcevable de ce côté-ci de la frontière, il y a au Québec certaines protections juridiques claires contre la discrimination basée sur l’orientation sexuelle.

Citons l’article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne, qui prévoit un droit à l’égalité. Il précise que « toute personne a droit à la reconnaissance et à l’exercice, en pleine égalité, des droits et libertés de la personne, sans distinction, exclusion ou préférence », entre autres en lien avec l’orientation sexuelle, l’identité ou l’expression de genre.

Et à l’article 12, on spécifie que nul ne peut, par discrimination, aller à l’encontre du droit à l’égalité en refusant de conclure un « acte juridique ayant pour objet des biens ou des services ordinairement offerts au public ».

Ce qui pose problème de façon urgente, en revanche, c’est que la décision qui vient d’être rendue par la Cour suprême aux États-Unis est la pointe d’un iceberg qui prend rapidement de l’ampleur.

Le reste de cet iceberg a été décrit récemment par le chanteur Elton John de façon simple et concise : il y a « une vague croissante de colère et d’homophobie qui se propage aux États-Unis ».

Il a comparé les attaques – tant physiques que politiques – auxquelles font face les personnes LGBTQ+ à un virus.

Les virus, on le sait trop bien, se foutent éperdument des frontières. Et celui-ci est très contagieux.

On n’est même plus dans la spéculation.

La contamination s’observe déjà.

La flambée de haine et d’intolérance qui déchire les États-Unis s’étend comme une tache d’huile au nord du 45e parallèle.

Comment interpréter autrement le mouvement contre les drag queens qui s’est déployé au cours des derniers mois au Québec ? Et sa récupération par le chef du Parti conservateur, Éric Duhaime ?

Le discours anti-trans est également en pleine croissance. Et il a aussi trouvé un porte-étendard flamboyant parmi les politiciens d’ici : Maxime Bernier. Le Beauceron a dévoilé récemment une politique pour lutter contre « la normalisation de l’idéologie transgenre ».

Jusqu’ici, ces positionnements, qui transpirent l’intolérance et stimulent l’hostilité, sont véhiculés par des politiciens marginaux. Mais ce n’est pas une raison pour baisser la garde.

On a pu constater au cours de la dernière décennie, aux États-Unis, que le progrès social n’est pas irréversible. Et qu’un politicien qui semble trop radical pour être élu peut tout de même triompher.

Les chiffres aussi sont alarmants. Les plus récents offerts par Statistique Canada démontrent que le nombre de crimes haineux basés sur l’orientation sexuelle au Canada a connu une hausse marquée. On est passé de 258 incidents en 2020 à 423 en 2021. Et ça représente assurément une sous-estimation du nombre réel.

Aux États-Unis, la situation risque fort de s’envenimer plutôt que de s’améliorer. Selon l’American Civil Liberties Union, tout près de 500 législations « anti-LGBTQ » ont été mises de l’avant dans divers États américains depuis le début de l’année. Un record.

Certains prétendants à la Maison-Blanche sont parmi les politiciens les plus radicaux à ce sujet. L’équipe de campagne du gouverneur floridien Ron DeSantis vient même d’être accusée d’avoir relayé une vidéo homophobe sur Twitter.

Tout indique qu’on aura fort à faire au cours des prochaines années, de ce côté-ci de la frontière, pour se protéger contre ce virus et ainsi empêcher la situation de déraper.

Une version antérieure de ce texte évoquait le 49e parallèle alors qu'il s'agit plutôt du 45e parallèle.

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