Selon le gouvernement Legault, le Québec fait « face à une situation jamais vue » quant aux incendies de forêt.

On ne peut pas aborder ce sujet sans saluer, d’abord, le courage de tous ceux qui participent à la lutte pour combattre les incendies.

On ne peut pas l’aborder non plus sans faire preuve de solidarité avec les communautés qui sont frappées par ces brasiers. Au Québec, comme ailleurs au pays.

Enfin, on doit s’entendre sur le fait que si ce qui se passe au Québec est sans précédent – depuis environ une centaine d’années, à tout le moins –, ça ne signifie pas que ce genre de situation catastrophique est imprévisible.

Et ça ne veut pas dire, non plus, que la situation est exceptionnelle.

Au contraire.

Des incendies si intenses sur un si vaste territoire (c’est ce que la ministre des Ressources naturelles, Maïté Blanchette Vézina, a voulu dire par « situation jamais vue »), dans le contexte actuel, c’est susceptible de se reproduire.

Le risque d’incendies de forêt et leur intensité potentielle ont déjà augmenté sur la planète en raison des changements climatiques. Et l’inquiétante tendance va se poursuivre.

Possiblement sur une plus longue période chaque année, car la saison des incendies pourrait commencer plus tôt, parallèlement aux sécheresses plus intenses.

Comme on le constate ici ce printemps.

Ni le Québec ni le Canada ne sont bien sûr immunisés contre ce phénomène – on garde encore en mémoire l’incendie dévastateur de Fort McMurray, en 2016, sans compter que des forêts de l’ouest du pays ont déjà été ravagées cette année.

Mais tant le Québec que le Canada peuvent agir pour atténuer l’impact des changements climatiques sur nos forêts.

Il ne s’agit pas d’être alarmiste. C’est simplement faire preuve de logique et de prévoyance.

Dans la première évaluation publique, stratégique et nationale des risques de catastrophes au Canada, qui vient tout juste d’être publiée par Ottawa, on signale que la superficie du territoire détruite chaque année au pays par les incendies de forêt devrait doubler d’ici la fin du siècle.

On prédit par conséquent qu’il y aura davantage de personnes et d’infrastructures « en danger ».

Chose utile, on met aussi l’accent sur ce qui n’a pas encore été fait pour mieux s’adapter à cette évolution prévisible.

On évoque, dans ce Profil national des risques :

  • La faible sensibilisation du public et le peu d’actions préventives visant à protéger les maisons, les biens et les quartiers.
  • Des lacunes dans les connaissances scientifiques et dans les outils et technologies de gestion des incendies de forêt.
  • L’intégration des populations autochtones et des diverses connaissances autochtones dans la gestion et l’intervention en cas d’incendies de forêt.
  • La résilience structurelle face aux incendies de forêt, en particulier dans les zones à risque élevé.

Ce n’est pas que nous n’avons encore rien fait, c’est qu’on n’avance pas assez vite. Pourtant, ne pas mettre en œuvre sur le terrain une stratégie en plusieurs volets pour mieux s’adapter, ça revient à se battre avec une main dans le dos contre des incendies de plus en plus redoutables.

« Je pense que la solution, c’est de changer de paradigme, d’arrêter de penser qu’on va tous les arrêter [les incendies] pour plutôt prévenir les impacts qu’ils auront sur les communautés et les infrastructures », nous a expliqué Yves Bergeron, professeur qui est notamment chercheur à l’Institut de recherche sur les forêts de l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue.

Des exemples concrets de gestes qu’on pourrait faire pour y parvenir ? Ça va de se doter d’un système de télédétection précoce des incendies à modifier nos objectifs de reboisement pour planter davantage de pin gris, par exemple, « beaucoup plus adapté au feu que l’épinette noire ».

Et ça implique aussi de repenser la présence d’habitations à proximité des zones à risque, évidemment.

Mais si l’adaptation est essentielle, elle a aussi ses limites.

Ces gestes ne suffiront pas si on n’en fait pas d’autres pour décarboner notre économie plus rapidement. Jusqu’ici, nos efforts sont insuffisants. Chaque année qui passe rend le constat toujours plus accablant.

Ces grands incendies n’ont pas fini leurs ravages, hélas. Mais ils font déjà partie de ces maux qui nous forcent à mettre de l’avant de grands remèdes.

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