On explore la planète Mars. On rebranche les nerfs de la main d’une tétraplégique. On apprend à un robot à rédiger une dissertation de philosophie… Mais on n’a toujours pas trouvé la façon de payer les femmes équitablement.

Dans ce domaine, les obstacles sont insurmontables, semble-t-il. Et la patience des femmes, infinie.

Les plus récentes données de l’Institut de la statistique du Québec le confirment : les femmes demeurent moins bien payées que les hommes. En 2022, leur rémunération horaire moyenne se situait autour de 29 $ alors que pour les hommes du même groupe d’âge (15 ans et plus), elle était d’environ 32 $. Dit autrement, les hommes étaient payés en moyenne 11 % de plus que les femmes. Pire encore, l’écart est plus grand qu’en 2005. En dollar constant, il est passé de 2,75 $ à 3,25 $ en 18 ans…

Cette différence de salaire s’observe tout au long de la vie active des femmes. Inévitablement, si les femmes sont moins payées, elles sont donc plus pauvres. En 2020, les femmes gagnaient en moyenne 36 200 $ annuellement, contre 44 000 $ pour les hommes, et ce, malgré une hausse de revenus plus marquée chez les femmes cette année-là grâce aux mesures d’aide liées à la pandémie.

Ce déséquilibre s’expliquerait mieux si les femmes étaient moins diplômées que les hommes. Mais voilà, elles sont plus nombreuses que leurs confrères masculins à poursuivre des études supérieures. Or même lorsqu’elles étudient en droit ou en médecine – les filles y sont en majorité –, elles sont moins rémunérées que leurs collègues masculins. Même sans diplôme d’études secondaires, les hommes s’intègrent plus facilement au marché du travail que leurs consœurs.

Vers la fin de la vie, ces inégalités font mal : les femmes reçoivent 80 % du revenu des hommes à la retraite, selon des données compilées en 2021 par le Mercer CFA Institute.

Bien sûr, il y a des raisons systémiques qui expliquent cet écart : les femmes travaillent davantage à temps partiel, occupent des emplois moins bien rémunérés (tout le secteur des soins, par exemple) et malgré les avancées de la science, ce sont encore elles qui portent les enfants et donc, qui mettent leur vie professionnelle sur pause durant plusieurs mois. Ajoutons à cela que les femmes consacrent toujours plus de temps aux tâches domestiques et au travail non rémunéré que les hommes. Le dévouement n’est pas très payant.

On ne dira jamais à quel point les femmes ont été et sont encore très patientes. Au Québec, la Loi sur l’équité salariale a été adoptée en 1996. Elle est entrée en vigueur l’année suivante. Or 25 ans plus tard, elle n’a pas entièrement atteint son objectif.

Bien sûr, on peut voir le verre à moitié plein et se dire que la situation s’améliore. Que les femmes reviennent de loin, qu’il y a encore des victoires à célébrer, comme le fait qu’elles n’ont jamais été aussi nombreuses sur le marché du travail, qu’elles siègent en plus grand nombre aux conseils d’administration des sociétés d’État, ou que leur salaire a augmenté au cours des dernières années (celui des hommes a augmenté davantage, cela dit). Mais la réalité demeure : en 2023, les femmes comparent leur situation à celle de leurs contemporains, pas à celle de leur arrière-grand-mère. Et la conclusion les frappe en plein visage : à travail égal, elles sont moins bien payées que leurs collègues.

Dans un document publié à la veille de la Journée internationale des droits des femmes, la Banque Royale du Canada mettait le doigt sur un des bobos : même si les femmes sont aussi nombreuses que les hommes sur le marché du travail, ces derniers occupent les deux tiers des postes de haute direction. Et c’est encore pire chez les parents : les pères occupent 10 % de ces postes décisionnels, contre moins de 3 % pour les mères.

Alors oui, il reste du travail à faire. Les femmes doivent être mieux représentées dans les postes décisionnels, les postes qui peuvent avoir une influence sur la réalité de toutes les femmes.

Les entreprises doivent redoubler d’efforts pour favoriser leur progression jusqu’aux plus hauts postes de direction. Le plafond de verre ne craquera pas tout seul. Il a besoin d’un bon coup de pied pour éclater en morceaux une fois pour toutes.

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