Armons-nous de patience. Un an après l’invasion de la Russie, c’est une guerre d’usure qui s’installe en Ukraine. Pour vaincre, nous devons redoubler de persévérance et d’efforts.

Le Canada n’est plus à l’heure de la distribution de gilets pare-balles. Ni à celle où il hésitait à fournir du matériel offensif aux Ukrainiens, par crainte d’une escalade qui mènerait droit vers un conflit nucléaire. Les menaces de Vladimir Poutine, qui fort heureusement n’ont jamais été mises à exécution, ont perdu leur résonance. Surtout avec le rappel à l’ordre de la Chine.

L’heure est donc venue pour le Canada et ses alliés d’en faire plus. Beaucoup plus.

Quoi au juste ?

Commençons par écarter ce qu’il serait risqué d’entreprendre : négocier. Ou plus précisément, négocier à la place de l’Ukraine, comme si le pays n’était qu’un banal pion sur l’échiquier mondial contrôlé par les grandes puissances.

Bien sûr, on voudrait que le conflit se termine au plus vite pour arrêter la désolation et les morts qui se comptent déjà par centaines de milliers. En mars dernier, il y a bien eu des tentatives de négociation de paix sous l’égide de la Turquie et d’Israël qui prévoyaient notamment le retrait des armes et la neutralité de l’Ukraine. Mais tout a déraillé.

Aujourd’hui, les familles ukrainiennes ont trop souffert pour accepter des compromis. Elles veulent se battre jusqu’au bout. Et Vladimir Poutine a l’impression d’avoir plus à gagner sur le champ de bataille qu’à la table de négociation.

Si personne ne veut rien céder, de nouvelles discussions resteraient vaines, pour l’instant.

Hélas, la guerre se poursuit et les bombardements incessants de la Russie en témoignent.

N’ayant rien à perdre sur son territoire, la Russie a le temps de son côté. Elle espère que la lassitude s’installera du côté des pays de l’OTAN et que les coûts de la guerre braqueront l’opinion publique occidentale.

Mais n’oublions jamais l’importance de soutenir l’Ukraine.

On ne peut pas tolérer qu’un pays souverain, en plein cœur de l’Europe, soit envahi par son voisin.

Au mépris de la population qui paie de son sang.

Au mépris total des règles internationales.

Au mépris des démocraties libérales.

C’est que l’ordre mondial, bâti sur les ruines de la Seconde Guerre mondiale, qui est remis en question par cette guerre, ni plus ni moins.

Il est donc dans notre intérêt de nous opposer à cette invasion. Baisser les bras équivaudrait à dire aux dictateurs de la planète qu’ils peuvent redessiner la carte du monde à leur guise, sans subir de conséquences.

C’est ainsi que la relative indifférence occidentale qui a laissé la Russie prendre le contrôle de la Crimée en 2014 a ouvert la voie à l’invasion de l’Ukraine en 2022.

Jusqu’ici, le Canada a parlé haut et fort pour défendre l’Ukraine. Tant mieux. Il a fourni 5 milliards de dollars d’aide à l’Ukraine, ce qui en fait un des plus importants donateurs… en dollars absolus.

Mais en proportion de la taille de notre économie, l’effort du Canada (0,23 % du PIB) se classe seulement au 26e rang sur une quarantaine de pays répertoriés par le Kiel Institute.

Il est surpassé par bien d’autres États comme l’Estonie (1,3 %) et la Pologne (0,75 %), mais aussi les Pays-Bas (0,38 %), l’Espagne (0,35 %), l’Allemagne (0,33 %), la France (0,28 %) ou encore l’Italie (0,27 %).

Le Canada doit en faire davantage.

Jusqu’ici, nous avons envoyé des équipements qui restaient dans nos hangars dégarnis par des décennies de sous-investissement dans le domaine militaire.

Mais comme la guerre s’annonce longue, il faut voir à long terme, si on ne veut pas être continuellement pris de court. Inspirons-nous de la Norvège qui a annoncé au début de février un plan de soutien sur cinq ans qui donne à l’Ukraine une meilleure prévisibilité.

On sait aussi que la guerre sera coûteuse en munitions, dont les réserves commencent à fondre sur le front.

Or, le Canada n’a pas encore ouvert les valves pour demander à son industrie d’armement d’augmenter sa production pour livrer, par exemple, des obus d’artillerie de 155 mm.

Il faut démarrer la machine au plus vite, car raviver notre complexe industriel militaire ne se fait pas en claquant des doigts. À preuve, cela fait plus de 10 ans que nos soldats attendent le remplacement de leurs pistolets qui datent de la Seconde Guerre et qu’on voudrait produire au pays.

Depuis le début de l’invasion en Ukraine, l’Occident est resté assis sur la clôture, agissant toujours un peu trop tard et jamais tout à fait assez fort. C’est le talon d’Achille de nos démocraties, où l’on réfléchit à court terme et on accouche de solutions de compromis.

Mais cette ambiguïté fait en sorte que la guerre s’éternise.

La triste réalité, c’est que les guerres se terminent, non pas parce qu’on le souhaite en toute bonne foi, mais parce que l’agresseur subit des coûts trop importants pour continuer.

C’est de cette façon que les États-Unis ont quitté le Viêtnam en 1973 et que l’URSS est partie de l’Afghanistan en 1989 en laissant dans son sillage une rébellion qu’elle n’avait jamais réussi à mater en dix ans d’occupation.

Il faut en faire davantage pour que la Russie batte un jour en retraite en Ukraine. Le plus tôt sera le mieux.

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