Il n’y a pas beaucoup de spécialistes de l’enseignement du français qui sont tombés en bas de leur chaise en découvrant les récents résultats à l’examen de français écrit de 5e secondaire.

C’était un peu écrit dans le ciel qu’après deux ans de pandémie, ces résultats – dévoilés par La Presse lundi – seraient désastreux. Dans tous les centres de services scolaires du Québec sauf six, le taux de réussite des élèves a baissé.

Il faudrait maintenant que cette catastrophe ait l’effet d’un électrochoc pour le nouveau ministre de l’Éducation Bernard Drainville, qui doit présenter son plan de match jeudi.

On verra alors si les promesses de son chef François Legault de (re)faire de l’éducation sa priorité étaient sincères. Et s’il est prêt à prendre les mesures qui s’imposent pour redresser la barre.

En matière d’enseignement du français – qui devrait être la priorité des priorités en éducation – la bonne nouvelle, c’est que le nouveau ministre n’a même pas besoin de mettre sur pied une commission pour comprendre ce qui ne tourne pas rond.

On connaît déjà les raisons du faible taux de réussite à l’épreuve de français.

Elles sont d’abord circonstancielles : la foutue pandémie. Les élèves de l’école publique en particulier ont perdu un temps précieux durant ces deux années, leurs enseignants étant en général peu ou pas outillés pour faire l’école à distance. Les finissants sont arrivés à la ligne d’arrivée la langue à terre et la motivation au plancher puisque le test de français écrit ne comptait plus que pour 20 % au lieu de 50 % de la note.

Ajoutez à cela une pénurie de personnel enseignant et la ronde des remplaçants qui vient avec, et vous avez tous les ingrédients pour un beau fiasco.

Les autres raisons qui expliquent les performances très moyennes des élèves en français – performances qui se répercutent au cégep et à l’université – on les connaît depuis longtemps.

Dans deux semaines, on soulignera les 15 ans du plan d’action de la ministre de l’Éducation Michelle Courchesne intitulé… Le français, une priorité à l’école, un devoir de société. Les constats du rapport Ouellon à l’origine de ce document s’appliquent encore aujourd’hui. Et la plupart des solutions sont toujours pertinentes en 2023. On se demande pourquoi on ne les a jamais appliquées.

À commencer par l’importance de l’écriture. Les élèves n’écrivent pas assez. Ils devraient écrire tous les jours. C’est en forgeant qu’on devient forgeron et c’est en écrivant qu’on développe sa pensée et qu’on apprend à maîtriser la langue française sous toutes les coutures.

Ensuite il faut valoriser l’importance du français dans toutes les matières, pas seulement en français. Il y a 15 ans, l’Université de Sherbrooke a rendu obligatoire le cours Lecture, écriture et réussite scolaire à tous ses futurs enseignants. C’est la base. En histoire ou en science, un élève devrait savoir accorder ses verbes et ses adjectifs, deux écueils majeurs observés par les enseignants.

Ensuite il n’y a pas de magie : il faut lire et lire encore.

Le ministre Drainville a déjà annoncé une allocation de 300 $ par année par enseignant du préscolaire et du primaire pour l’achat de livres. C’est un minimum. Dans une province où la littérature jeunesse est aussi foisonnante, c’est un drame que les rayons des bibliothèques scolaires soient à ce point dégarnis.

Et il n’y a pas que la fiction. Pour développer l’esprit critique des jeunes et leur apprendre à argumenter, rien de mieux que la lecture d’essais, de journaux et de magazines.

Enfin la formation continue des enseignants est également au cœur de la solution, à commencer par leur apprendre à enseigner l’utilisation des nouveaux outils numériques qui sont de plus en plus incontournables.

L’examen de français a sa raison d’être : c’est un repère qui nous permet de faire le point et de nous comparer. Mais soyons honnêtes : dans sa forme actuelle, il nous induit en erreur.

On aimerait qu’il nous renseigne sur les compétences des jeunes en français. Il nous montre plutôt à quel point les élèves ont été bien préparés par leur enseignant qui a consacré beaucoup de temps à cette épreuve, et pas suffisamment à leur enseigner.

Posons-nous la question : que souhaite-t-on inculquer aux jeunes ?

Si c’est de savoir lire et comprendre un texte complexe et défendre ses opinions à partir d’arguments solides, il reste beaucoup de travail à faire.

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