Il n’y en a eu que pour Donald Trump. Tout l’été. Ses 91 chefs d’accusation au criminel se sont traduits par des sondages montrant que sa popularité n’a pas fléchi auprès de la base électorale du Parti républicain. En fait, sa popularité augmentait avec chaque accusation.

Si bien qu’est en train de s’installer le même syndrome qu’en 2016 quand presque tout le monde croyait qu’il était impossible que Donald Trump ne l’emporte et que la victoire de Hillary Clinton était certaine. Il est vrai que M. Trump a un appui presque inexplicable dans la base républicaine. Au point qu’on oublie souvent que l’ancien président est loin d’avoir la même popularité auprès de l’ensemble de l’électorat.

Ainsi, il y a actuellement une solide majorité des enquêtes d’opinion qui donnent le président Joe Biden gagnant. Même si, on doit rappeler que l’élection se décide au Collège électoral et que les présidents George W. Bush et Donald Trump ont été élus sans avoir gagné le vote populaire.

Le principal problème pour M. Trump, c’est que de plus en plus d’électeurs américains se considèrent comme indépendants, c’est-à-dire qu’ils ne sont ni des partisans républicains ou démocrates. Dans un récent sondage Gallup, 41 % des répondants se disaient indépendants contre 20 % chacun pour les deux grands partis.

Or, les indépendants n’ont pas une haute opinion de M. Trump. Un sondage publié il y a quelques jours à peine par le magazine Politico montrait que la majorité (53 %) des électeurs indépendants croyaient que M. Trump était coupable des accusations d’avoir tenté de changer les résultats des élections de 2020.

Évidemment, M. Trump est passé maître dans l’art de diaboliser ses adversaires et même les institutions qui pourraient s’opposer à lui. Une tactique qui fonctionne bien auprès de ses partisans, mais beaucoup moins auprès de l’électorat en général.

Ainsi, les républicains reprennent en chœur son mantra voulant que le ministère fédéral de la Justice le cible injustement. Mais près des deux tiers (64 %) des électeurs indépendants croient plutôt que le ministère de la Justice a été équitable.

On pourrait continuer, mais il est de plus en plus clair qu’une bonne partie du discours de M. Trump et de ses partisans au Congrès ne rejoint plus guère que les électeurs républicains purs et durs. La majorité des électeurs sont plus nuancés.

En fait, M. Trump s’adresse actuellement à une fraction bien précise de l’électorat : ceux qui considèrent que leur situation personnelle se détériore et que le pays est gouverné par des élites qui ne se soucient pas de ceux qui ont du mal à joindre les deux bouts et ne voient pas comment ils pourraient améliorer leur sort.

Pas étonnant que la chanson la plus populaire aux rassemblements républicains depuis quelques semaines s’appelle Rich Men North of Richmond (Les riches qui vivent au nord de Richmond), la capitale de la Virginie, et qui ne savent rien de la vie des gens ordinaires. C’est vrai que c’est au sud de Richmond que vivent la majorité des partisans de M. Trump.

PHOTO KENDALL WARNER, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Le chanteur Oliver Anthony, auteur de la chanson Rich Men North of Richmond

Mais la chanson montre combien le discours optimiste de l’époque de Ronald Reagan ne fait plus recette au Parti républicain où on parle plutôt de canaliser la colère de ceux qui se sentent laissés pour compte.

Mais il y a aussi un nombre croissant d’électeurs qui craignent les effets du récent virage à droite de la Cour suprême, par exemple, sur l’avortement. Cet été l’Ohio, un État solidement républicain depuis quelques décennies, a vu les démocrates gagner un référendum mené par les républicains visant à protéger la Constitution de l’État contre d’éventuelles poursuites, entres autres en matière d’avortement.

Est-ce à dire qu’on ne pourrait pas avoir de surprises lors de l’élection de novembre 2024 ? Ce serait très prématuré et tout aussi téméraire.

Depuis plusieurs cycles électoraux, on note que les marges de victoire sont plutôt minces. Par exemple, en 2012, très peu de gens prédisaient une défaite du président Barack Obama. Pourtant, il n’aura été réélu qu’avec 51,1 % des voix contre 47,2 % à son rival républicain, Mitt Romney. M. Obama avait gagné 26 États contre 24 pour M. Romney.

Cette fois, il est clair que M. Trump estime que la grande faiblesse de Joe Biden est son âge : il aurait 86 ans à la fin de son second mandat. M. Trump n’a que quatre ans de moins, mais il fait déjà jouer en boucle les images de M. Biden qui trébuche ou qui semble avoir peu d’énergie.

Et on se souviendra que M. Biden était assez lucide pour rouler dans la farine le leader des républicains au Congrès, Kevin McCarthy, lors des négociations sur le budget. Mais la grande majorité des Américains ne sont pas convaincus, et il faudra voir si l’âge de son adversaire pourra devenir un argument déterminant pour M. Trump.