Dans le complexe mais fondamental enjeu du logement, les solutions ne seront pas uniques ni détenues par un seul acteur. Il est temps de se mettre à plusieurs pour les trouver.

L’une des choses que je préfère, dans mon travail, est le temps que je passe auprès des organismes communautaires dans lesquels nous investissons. Pour moi, aller à la rencontre des tisserands de notre courtepointe sociale est plus qu’une occasion d’apprendre : c’est carrément un exercice de ressourcement. Je prends ainsi le pouls des acteurs, de la population et des enjeux sociaux du Grand Montréal.

Ce sont ces rencontres qui m’ont permis d’arriver au constat que j’ai déjà évoqué ici : nous devons amorcer de vastes chantiers de travail qui permettront de nous attaquer aux causes mêmes de la pauvreté. Et ces chantiers doivent commencer par des conversations.

On me demande souvent ce que fait Centraide, et ma réponse tient en 11 mots : rassembler et agir pour un Grand Montréal inclusif et sans pauvreté.

Le sérieux de notre approche et de nos analyses en développement social, la profondeur de l’implication de nos bénévoles, ainsi que l’excellence de nos communications et processus administratifs font de Centraide un acteur reconnu et crédible depuis maintenant 50 ans.

L’approche de proximité que nous avons développée au sein des quartiers et auprès des organismes communautaires, de même que l’attention que nous apportons aux effets de la pauvreté, est le ciment de notre organisation. Et cela ne changera pas.

Mais au cours de la dernière année, nous avons aussi eu envie de mettre ces forces au profit de la lutte contre les causes de la pauvreté, pas seulement ses effets.

La Grande conversation

Ainsi, durant les 12 derniers mois, misant sur cette crédibilité acquise au fils des ans, nous avons accordé une attention particulière à la question du logement et activé ce que j’appelle le levier d’influence stratégique et social de Centraide.

À maintes reprises, nous avons par exemple pris position, publiquement et informellement, pour défendre le dossier du logement. Comme d’autres, nous avons suggéré au gouvernement de nommer un ou une ministre de l’Habitation ; nous avons réuni plusieurs acteurs afin de faire le point sur la situation actuelle en matière de logement ; et cætera.

Les prises de contact avec les acteurs du milieu du logement – chercheurs, organismes communautaires, santé publique, villes et gouvernements – ont été très révélatrices et nous ont permis de jeter un regard nouveau et critique sur la question.

Avec un groupe de travail diversifié, nous avons entre autres déterminé 115 freins ou possibilités sur les questions du logement.

Cette démarche a été le point de départ de la Grande conversation sur le logement, qui se tiendra à Montréal le 15 mai prochain lors de l’évènement Agir ensemble pour le logement.

Il est étonnant à quel point, au fond, nous détenons peu de données sur cette question. Et beaucoup de celles-ci sont incomplètes ou dépassées.

Il nous apparaissait important de s’attaquer à cette question, mais en parlant de l’impact sur les ménages. Mettre des visages sur les enjeux actuels, autrement dit, afin de mieux les saisir. Vous conviendrez qu’il est plus facile d’inspirer en parlant d’humains qu’en énumérant des statistiques : ce sont d’abord et avant tout des individus qui subissent les problèmes liés au logement.

De plus, la Grande conversation se veut une démarche vers des solutions qui ne seront pas uniques ni détenues par un seul acteur.

Il nous faut donc d’abord établir les faits. Des faits solides, indiscutables, qui traceront le véritable portrait de la situation des ménages du Grand Montréal. Nous avons fait appel à divers spécialistes en la matière et les chiffres en disent long sur l’ampleur des besoins, mais les écarts sont difficiles à saisir. Les résultats seront dévoilés le 15 mai prochain. Ils nous démontrent entre autres que le rythme actuel de construction ne permettra pas de rattraper le temps perdu et d’offrir une solution à court terme ni même à moyen terme. Le même raisonnement s’applique pour le travail en silo où chacun reste dans son coin.

Le logement est un enjeu de société complexe et à cause de cela, il nous faudra entrer dans le monde des « et ». En cherchant plusieurs solutions différentes, de nombreux acteurs devront se mettre au travail avec comme seul intérêt de faire mieux, de viser plus haut, de s’assurer que nous progressons, indicateurs à l’appui, hors des horizons électoraux.

Je dis souvent que je préfère les possibilités de l’avenir aux séances de défoulement à propos de ce qui n’a pas fonctionné dans le passé. Au cours des prochaines semaines, nous commencerons à couler la fondation de cette essentielle mobilisation collective.