Pour relever les défis de la transition sociale et environnementale à laquelle notre société fait face, la créativité scientifique et un dialogue ouvert avec le grand public sont plus que jamais indispensables. Dans ce contexte, amplifier l’enseignement et la pratique de la science en français peut contribuer à l’accélération de l’innovation et à l’adoption de nouveaux comportements.

Alors que de nombreuses études font le constat d’une anglicisation de la science, l’Université de Montréal, HEC Montréal et Polytechnique Montréal accueilleront, du 8 au 12 mai prochains, le 90e Congrès de l’ACFAS. Cette grande fête de la science en français coïncide avec le 100e anniversaire de l’ACFAS et illustre le dynamisme de la grande communauté scientifique francophone, ici au Québec mais aussi plus largement au Canada et partout dans le monde. Cette année, ce sont près de 350 colloques et 700 communications libres qui offriront une véritable caisse de résonance à des travaux de recherche menés sur des thèmes de pointe aussi variés que les maladies du cerveau, l’exploration spatiale ou encore les finances des ménages en passant par les métiers de la musique et la gestion du changement pour un monde durable.

La nécessité de faire entendre une autre voix

Au fil des années, l’anglais s’est imposé comme la langue commune de la science. On peut reconnaître que son utilisation permet aux chercheuses et aux chercheurs d’ici et d’ailleurs de rejoindre la communauté internationale scientifique et de contribuer ainsi à l’avancement des savoirs et à la résolution des problèmes les plus pressants. Cependant, si l’usage commun de l’anglais est pratique, il faut aussi dire que le recours exclusif à son utilisation dans la recherche et la communication scientifique n’est pas neutre. Il influe sur le mode de pensée de ses utilisateurs, notamment des personnes non anglophones, et impose subrepticement une manière d’aborder le monde. Or, la grande richesse de nos établissements universitaires est la présence et l’importance des diversités, qu’elles soient culturelles, de genres, de points de vue : toutes sont essentielles à la vivacité de la science.

Aujourd’hui, face à la complexité des enjeux, les solutions ne dépendent plus d’un seul individu ou d’une seule spécialité, mais d’équipes multidisciplinaires qui, mutuellement, s’enrichissent de leurs différentes perspectives.

Dans ce contexte, la capacité de mener ses travaux de recherche dans une autre langue que l’anglais s’avère primordiale car elle favorise des chemins de pensée autres et, par conséquent, stimule l’innovation.

C’est pourquoi, dans l’ensemble des expertises mondiales, la science francophone doit continuer à faire entendre sa voix soit lors de congrès comme celui de l’ACFAS, soit par l’entremise de revues ou de portails scientifiques en français, qu’il nous apparaît indispensable de soutenir.

Un dialogue nécessaire avec les communautés

Tout aussi important que de faire de la recherche dans la langue de son choix, diffuser la science en français pour rejoindre le grand public est aussi primordial. Rappelons que le français est la cinquième langue parmi les plus parlées dans le monde et respectivement quatrième et troisième pour la présence sur l’internet et dans le milieu des affaires ; on compte plus de 300 millions de francophones dans le monde, dont 8 millions au Canada.

Donner accès à une science en français facilite le partage des connaissances entre chercheurs et chercheuses et avec la société. Cela permet d’enrichir la culture scientifique des citoyennes et des citoyens et de lutter contre la désinformation. Enfin, à l’heure où la concertation avec les communautés locales est primordiale, la vulgarisation scientifique en français favorise une meilleure compréhension des faits et des échanges éclairés qui peuvent conduire à l’acceptabilité et, ultimement, au changement des comportements.

Aucun acteur ne pourra à lui seul assurer la survie et la vitalité de la science en français, que ce soit au Québec ou dans le monde. Établissements d’enseignement, organismes de culture, médias, acteurs institutionnels et gouvernements : il nous faut agir de concert. Nous avons chacun notre rôle à jouer pour créer un écosystème qui permettra à la science en français de faire entendre sa voix et de contribuer ainsi à l’émergence d’un monde plus durable, plus harmonieux et plus inclusif.

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