Quand il est revenu de ses vacances des Fêtes, le président Joe Biden n’a pas annoncé son intention de solliciter un deuxième mandat à la présidence en 2024. Mais c’était tout comme.

Le bilan de ses deux premières années était tout à fait honorable : il avait fait adopter un plan ambitieux pour relancer l’économie après la pandémie et aussi la loi sur la réduction de l’inflation, dont il ne faut pas se fier au titre puisqu’il s’agit, en fait, d’un vaste plan d’investissement dans l’infrastructure et la nouvelle économie.

Aussi, la première loi de contrôle des armes à feu, trop timide, sans doute, mais qui est quand même la première en 30 ans. Une loi sur le décompte des votes électoraux pour éviter une autre émeute du 6-janvier. Une loi protégeant le mariage des couples de même sexe. Sans compter qu’il a fortement contribué à la coalition des pays occidentaux pour soutenir l’Ukraine.

Normalement, le parti qui est dans l’opposition a de très bons résultats lors des élections de mi-mandat. Mais en novembre dernier, contre toute attente, les démocrates ont conservé la majorité au Sénat et les républicains ont bien la majorité à la Chambre des représentants, mais par l’inconfortable marge de quatre sièges seulement.

C’est ce qui faisait dire, au début de l’année, que M. Biden était, en fin de compte, le meilleur candidat que les démocrates pourraient présenter en 2024. La vice-présidente Kamala Harris cherche encore comment elle pourrait avoir un impact maintenant qu’on n’a plus besoin de son vote pour dénouer une impasse au Sénat. Et le banc des joueurs chez les démocrates n’est pas particulièrement remarquable. Alors, pourquoi changer ?

C’était il y a un mois. Depuis, les républicains ont donné un triste spectacle de 15 tours de scrutin où le nouveau président de la Chambre des représentants, Kevin McCarthy, a dû faire toutes sortes de concessions à l’aile la plus radicale de son parti.

Mais les sondages publiés au cours des derniers jours montrent que le bilan de M. Biden suscite assez peu d’enthousiasme.

Ainsi, un sondage Washington Post-ABC montre qu’autant chez les républicains que chez les démocrates, on ne veut pas d’un match revanche entre Donald Trump et Joe Biden : 49 % des républicains veulent un autre candidat que Trump, mais pas moins de 58 % des démocrates veulent quelqu’un d’autre que Joe Biden.

Si le match revanche devait se produire, Trump obtiendrait 48 %, contre 45 % pour Biden, ce qui est dans la marge d’erreur du sondage. Le taux de popularité du président Biden reste relativement bas avec 42 % de satisfaits et 53 % d’insatisfaits.

Mais, ce qui est plus sérieux, 62 % des Américains croient que Biden n’a rien fait ou fait très peu de choses qui ont un impact dans leur vie, contre seulement 36 % qui pensent qu’il a fait de bonnes choses pour eux.

Les démocrates aimaient penser que la plupart des Américains approuvaient les initiatives de l’administration Biden, même s’ils ne le disaient pas. Ce sondage montre que ce n’est pas si évident…

Et il y a la question des documents classifiés comme secrets d’État qui ont été retrouvés à son bureau et dans sa résidence du Delaware.

Il est vrai que tous les documents sans exception ont été remis aux Archives nationales, comme la loi l’exige, et que M. Biden a collaboré avec l’enquête.

Tout comme l’ancien vice-président Mike Pence, chez qui on a aussi retrouvé quelques documents secrets.

Il n’y a pas de comparaison possible avec l’attitude de Donald Trump, qui refuse de rendre les documents secrets qu’il a emportés avec lui en quittant la Maison-Blanche, et qui prétend qu’un président pouvait déclassifier des documents « juste en y pensant ».

Mais la perception, c’est que Biden n’est pas vraiment plus vertueux que Trump, et la façon désinvolte avec laquelle Biden a répondu aux questions des journalistes sur cette situation vient, en quelque sorte, confirmer cette perception.

Et enfin, il y a la question de l’âge. Il a eu 80 ans en novembre dernier, le président le plus âgé de l’histoire américaine. S’il était réélu, il aurait donc 86 ans lorsqu’il finirait son second mandat.

Pour les amateurs de statistiques, Konrad Adenauer a quitté son poste de chancelier de l’Allemagne fédérale à 87 ans (en 1963) et le pape François a eu 86 ans en décembre. Mais, sans faire d’âgisme, beaucoup de gens s’interrogent quand même sur la capacité d’occuper l’une des fonctions les plus exigeantes au monde à cet âge.

Il y a un mois, Joe Biden semblait plutôt bien placé pour obtenir un second mandat. Aujourd’hui, même si personne ne le dit tout haut, on se demande au sein même de son parti si ce serait une bonne idée.

Note : Cette chronique a été rédigée avant le discours sur l’état de l’Union de mardi soir.