Cette chronique pourrait sentir mauvais, le sujet est scatologique, je vais brasser un peu de merdouille.

Peut-être en avez-vous déjà entendu parler, mais je veux vous entretenir d’une exposition excrémentielle que j’ai visitée dernièrement, Ô merde !, présentée actuellement au Musée de la civilisation à Québec.

D’emblée en expliquant qu’elle a remporté un prix Excellence 2022 de la Société des musées du Québec, et qu’il faut féliciter le jury pour son goût raffiné, il a eu le nez fin. Et comme ça se passe à Québec, c’est l’occasion d’une autre petite poussée d’esprit de clocher du chroniqueur.

Le maire L’Allier avait déjà expliqué à une époque qu’une odeur de purin flottait sur la ville de Québec, en référant aux radios poubelles. Il n’aurait pas su si bien dire, on y célèbre ses paroles à Jean-Paul !

Cela dit, ça prend un front de bœuf pour investir dans la bouse, dans un musée national. Faut vraiment aimer courir après les emmerdes.

À la tête d’une ville, le côté moins glamour de la fonction est de prendre soin des effets du tube digestif. Où on traduit le mot merde par boue. Plus technique, et délicat, mais merde quand même. Ce qui fait qu’un maire doit s’investir dans les dossiers d’égouts. Cloaque, et ça fait désenfler une grosse tête.

Avec la production d’eau potable, pas de service plus essentiel que le traitement de la gadoue. Et à notre époque, il faut la valoriser, lui trouver une valeur ajoutée. Alors on biométhanise les boues. De la chimie. Ce qui donne un magnifique résultat, le digestat. Avec un peu d’imagination, le mot est en soi dégoûtant. Une fois séché et granulé, le digestat revient à la terre, comme engrais, pour compléter le cycle de la vie. L’économie circulaire.

Mais même si audacieuse, une telle exposition ne peut pas n’être que pipi caca. Faut faire sérieux. Alors on traite le sujet d’un point de vue historique, et scientifique. Le résultat est spectaculaire, pas emmerdant une seconde.

Les médecins le savent, on peut détecter l’état de santé d’un individu en ponctionnant et analysant le concentré dégueu. Pour monitorer la pandémie, on peut suivre la présence du virus en échantillonnant ce que vous savez, à la sortie des effluents.

Et il y a le trône, et les chiottes, avec la ligne du temps.

Et la façon, la position, et la disposition du résultat.

Étonnant, et à mourir de rire, les artefacts. Jadis, le confort de l’acte déterminait aussi la classe sociale. Dans la Rome ancienne, société plus équitable, et sociale-démocrate avant son temps, les latrines étaient publiques. On faisait ça en commun, on s’exécutait en piquant une jasette avec le voisin. Fallait pas être timide, et je vous passe les détails de l’ensemble de l’œuvre. Je ne la sens pas, celle-là.

Sachez qu’encore aujourd’hui, des millions de personnes dans le monde se battent toujours pour avoir accès à des toilettes. Et nous ici on débat sur les parcs à chiens…

Et vous pouvez faire l’expérience de milieux immersifs, en rapport avec la thématique. Ça vous inquiète ? Pas de soucis, tout est fait proprement.

Là où ils m’ont complètement eu, c’est cette section sur le pet. Ou l’art du pet, devrais-je dire. Et pourquoi, et comment le pet. Vous vous pensez bien intelligents sur le sujet, hein ? Des petites nouvelles pour vous, ça déculotte.

L’évolution des couches, avec le temps. Et les produits dérivés qui vont avec la prestation. J’ai découvert le papier de toilette de couleur. D’un chic, je ne vous dis pas. Même s’il vaut une fortune, vous feriez sensation chez les invités, ça se fendrait en quatre pour un faire-part.

Et les enfants ne sont pas en reste. On leur a fabriqué des jeux vidéo pédagogiques sur le sanitaire, ou leurs habitudes de vie. Génial.

En tout cas, un investissement de 800 000 $ qu’on ne qualifierait pas de down the drain. Et les commanditaires se sont précipités, semble-t-il. C’est dire comment on est ici dans le jeu de base, le besoin universel. Et on bat des records d’affluence. Pas de flatulences là ! Excusez-la, trop facile…

Allez, sortez un peu, une excellente activité familiale pour le temps des Fêtes ! Venez y mettre le nez dedans. Et je suis certain que la ville de Québec est encore plus belle que lors de votre dernière visite.

Entre nous

Une gondole a pris une débarque à la station de ski Mont-Sainte-Anne, dans la région de Québec. Heureusement qu’il n’y avait pas de passagers…

La montagne est un bien public, et la station exploitée par Resorts of the Canadian Rockies (RCR). Cette organisation est dirigée par le milliardaire albertain Murray Edwards, vivant maintenant à Londres, copropriétaire des Flames de Calgary de la LNH, qui a fait sa fortune dans le pétrole.

Le gars siphonne la station depuis son acquisition. Il n’y investit plus et l’attirail devient dangereux pour les utilisateurs. Un groupe d’acheteurs de Québec veut l’acquérir, avec à sa tête Daniel Gauthier, l’ex du Cirque du Soleil, propriétaire du Massif de Charlevoix, et Yvon Charest, ex-président d’iA. L’idée est d’unir les deux montagnes et d’en faire un domaine skiable de classe mondiale.

Et voilà que le gouvernement du Québec, grand naïf, croit encore une fois aux promesses d’investissements de RCR, une énième fois, et étudie même l’idée de leur refiler 50 millions de dollars pour payer 50 % de la facture !

Un chausson avec ça ?

Il y a sûrement quelque part une rupture de contrat de la part de RCR dans sa gestion. Alors, que le gouvernement les mette dehors et investisse avec des Québécois plutôt, avant qu’un malheur n’arrive. Suffit la procrastination dans ce dossier. On lui doit quoi, à Murray Edwards ? Ça fait vraiment dur !