Mon cœur s’est serré, et je suis certaine que le vôtre aussi, quand j’ai lu le reportage de mes collègues sur les conditions de vie entre les murs du centre jeunesse Cartier, à Laval⁠1. En un an, on y a noté une augmentation de 72 % du recours aux mesures de retrait et de contrôle auprès des jeunes, signe qu’il y a quelque chose qui ne tourne pas rond dans cette ressource. Ou en lisant, dans Le Soleil, l’histoire absolument tragique d’une adolescente qui en est à sa cinquième tentative de suicide au centre jeunesse Huberdeau.

L’an dernier, c’était le centre jeunesse du Mont Saint-Antoine, dans l’est de Montréal, qui faisait la manchette pour ses conditions pitoyables (infiltration d’eau, bâches installées au plafond, etc.). 

« Plus d’un cinquième des installations hébergeant des enfants sous la protection de la jeunesse au Québec sont dans un état de vétusté important », rappelaient récemment mes collègues qui avaient obtenu un bilan du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS)⁠2.

PHOTO PAUL CHIASSON, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Régine Laurent a présidé la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse.

La Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse, présidée par Régine Laurent, avait accompli un travail extraordinaire pour mettre en lumière les dysfonctionnements du système et proposer des solutions concrètes. Trois ans après le dépôt de son rapport, le système souffre toujours d’un déficit de bienveillance.

Accepterions-nous que nos enfants vivent dans de telles conditions ? On parle pourtant du milieu de vie quotidien de jeunes qu’on est censé aider.

Chaque fois que je lis un reportage qui dévoile des conditions inacceptables pour les enfants en centre jeunesse ou sous la protection de la DPJ, la même question me revient : mais qui parle en leur nom ? Qui proteste haut et fort quand leurs droits ne sont pas respectés ? Quand ils ne reçoivent pas les services qui leur sont dus ?

Ma question paraîtra sans doute naïve aux yeux des familles et des professionnels qui évoluent dans le milieu de la protection de la jeunesse, mais je sais que je ne suis pas la seule à me la poser.

1. Lisez le dossier « Des ‟tannants” en retrait dans des cellules », d’Ariane Lacoursière et de Caroline Touzin 2. Lisez l’article « Plus d’une installation sur cinq est vétuste », d’Ariane Lacoursière et de Katia Gagnon Lisez la chronique « Punie pour ses tentatives de suicide », de Mylène Moisan, du Soleil