C’est tout ce qu’il y a de plus normal dans nos sociétés contemporaines : une fois une crise terminée, on passe à un autre appel. On aborde de nouveaux problèmes à régler. On s’attaque aux plus récentes controverses à apaiser.

Pendant un bref moment, la crise la plus retentissante au Québec a été celle de la qualité de l’air. Montréal qui se retrouve numéro un au classement des villes avec la pire qualité de l’air au monde, ça secoue.

C’était la triste conséquence d’une autre crise. Celle provoquée par les incendies de forêt qui continuent de faire des ravages dans plusieurs secteurs de la province.

Mais cette crise aussi sera un jour derrière nous. On ne s’en plaindra pas. Le plus tôt sera le mieux. Si la danse de la pluie était efficace, nous serions nombreux à en apprendre les pas.

Le revers de la médaille, toutefois, c’est qu’on risque de passer à un autre appel. Il serait pourtant sage – et responsable – de tirer des leçons de ce qui s’est passé.

C’est ce qui a poussé Québec solidaire à expédier une lettre aux autres chefs des partis politiques de l’Assemblée nationale pour proposer, dès la rentrée parlementaire, une rencontre dans le but de planifier une « démarche transpartisane » sur l’adaptation aux changements climatiques.

La lettre est rédigée dans la foulée des incendies de cet été, mais aussi des inondations du printemps dernier.

« Les scientifiques nous préviennent depuis longtemps de l’intensification et de la multiplication de ces phénomènes naturels et de plusieurs autres (érosion des berges, canicules, sécheresses, etc.) dans le contexte des changements climatiques. Pourtant, de l’aveu même des autorités en place, le Québec n’était pas prêt à y faire face dans les derniers mois », écrit le co-porte-parole de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois.

C’est vrai. Et la vulnérabilité de notre territoire et de nos infrastructures nous saute en plein visage un peu plus chaque année.

On sait que le Québec est loin d’investir – et d’innover – à la hauteur du défi que représente l’adaptation aux changements climatiques.

Une preuve tangible, c’est que les municipalités du Québec ont estimé (à l’aide d’une étude en deux volets de la firme WSP) qu’elles auraient besoin d’injecter 2 milliards de dollars par année pour le relever, ce défi. Et ce jusqu’en 2055.

Ça représente une (nécessaire) augmentation d’environ 12 % des dépenses municipales actuelles.

Il serait injuste de dire qu’on regarde la situation évoluer, de Québec, les bras croisés. C’est vrai, le premier ministre avait initialement balayé la demande des municipalités du revers de la main l’automne dernier.

Mais le gouvernement a, depuis, annoncé des sommes additionnelles pour l’adaptation aux changements climatiques.

Au-delà des investissements, on note aussi certaines avancées très concrètes.

Un exemple cité par plusieurs experts : la gestion du risque de l’impact des changements climatiques sur les inondations. Les épisodes catastrophiques de 2017 et 2019 ont fait bouger les choses. On a fait beaucoup de progrès, notamment, quant à la cartographie des zones inondables.

Mais si on compare à un marathon le chemin qu’il nous reste à parcourir en matière d’adaptation dans tous les secteurs concernés, on est encore bien loin de la ligne d’arrivée.

C’est une riche idée d’en faire un enjeu transpartisan à Québec. Elle n’est d’ailleurs pas entièrement nouvelle. L’an dernier, avant de quitter la politique, le péquiste Sylvain Gaudreault avait proposé la formation d’un caucus de députés de tous les partis pour travailler à la lutte contre les changements climatiques⁠1.

Ces dernières années, on a pu constater l’effet positif du travail transpartisan, notamment sur la question de l’aide médicale à mourir ou sur celle des violences sexuelles.

Ça se comprend. Le sujet devient alors prioritaire. Les luttes partisanes et la politicaillerie passent au second plan. Tous les partis collaborent dans le but de trouver des solutions, chose rare.

C’est pourquoi, alors que le Québec est encore aux prises avec des incendies de forêt historiques, il faut souhaiter que l’idée d’une démarche transpartisane s’impose dès septembre à l’Assemblée nationale sur la question de l’adaptation aux changements climatiques.

Le défi est si grand, les enjeux tellement complexes, les gestes à faire si urgents qu’il serait vraiment absurde de s’en priver.

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