Montréal a un nouveau slogan depuis peu : « métropole francophone des Amériques ». Mais un autre slogan lui conviendrait tout aussi bien : « Montréal, métropole des vidanges »…

Une marche dans les rues des quartiers centraux suffira à convaincre les plus sceptiques : sacs à ordures éventrés, carcasses de poulet et autres restes de table étendus sur la chaussée, vieilles chaussettes trouées, papiers gras, mouchoirs roulés en boule… Chaque jour, le piéton est exposé au contenu du sac poubelle de son contemporain. Et c’est loin d’être croquignolet, pour reprendre un des mots chouchous de la ministre des Transports, Geneviève Guilbault.

Aux sacs à ordures qui garnissent les trottoirs, il faut ajouter les matelas, meubles et autres petits électroménagers que nos voisins abandonnent en bord de rue.

Pourquoi se déplacer à l’écocentre quand on peut tout balancer devant chez soi… c’est tellement plus simple !

Et que dire des mégots de cigarettes qui représenteraient 30 % des déchets au sol à Montréal.

Jeudi, notre collègue Isabelle Ducas rapportait dans nos pages⁠1 l’état lamentable des rues entourant l’Université McGill : les étudiants en fin de session qui retournent à la maison vident leur appartement et abandonnent la majorité de leurs possessions sur le trottoir. La situation se répète chaque année sans que la Ville ait trouvé de solution ! Ce n’est pas sérieux !

Rappelons que les Québécois sont les cancres de la gestion des déchets au pays avec 716 kg de matières résiduelles par habitant en 2021, une augmentation de 5 % par rapport à 2018.

On peut dire que Montréal est une belle vitrine qui met en valeur cette particularité toute québécoise. Pas étonnant que l’auteur Claude Meunier ait décidé de nous ramener son personnage de Pôpa de La Petite Vie. Nous avons un problème existentiel avec nos vidanges.

Pourtant ce ne sont pas les solutions qui manquent pour discipliner la population.

À commencer par faire payer les ménages pour les déchets qu’ils produisent. Cette idée, défendue par plusieurs, dont le professeur Pierre-Olivier Pineau, est déjà appliquée à Beaconsfield ainsi que dans plusieurs villes dans le monde.

Une taxe aux déchets peut prendre plusieurs formes : taxe annuelle en fonction de la taille des ménages, taxe au poids de déchets produits ou, comme dans certaines villes, distribution d’un nombre X de sacs-poubelle au-delà duquel les autres sacs deviennent payants. Dans tous les cas, les ménages à faibles revenus bénéficient d’une exemption ou de mesures spéciales.

Cette taxe aurait pour effet de conscientiser les individus à leur production incontrôlée de déchets et à les forcer à composter, à recycler et… à moins produire de déchets.

Ensuite il y a la façon dont on collecte les ordures en 2023 qui ne tient plus la route.

Comme l’a déjà déclaré le directeur général de l’organisme Montréal Centre-ville, Glenn Castanheira, la gestion des déchets à Montréal est digne du Moyen Âge…

Il est plus que temps de rendre obligatoires les poubelles de plastique pour toutes les maisons unifamiliales et les condos situés au rez-de-chaussée.

Il faut également installer des dépôts de déchets dans les quartiers pour éviter que les sacs à ordures apparaissent sur les trottoirs plusieurs jours avant la collecte.

Et pour éviter que les sacs à ordures s’amoncellent autour de ces éventuels sites de dépôt, il n’y a pas 36 000 solutions : il faut une meilleure surveillance, accompagnée d’amendes corsées, question de décourager les délinquants.

Même approche avec les propriétaires de chiens montréalais qui sont devenus pires que les Parisiens. Ceux qui ne ramassent pas les excréments de leur toutou méritent une amende salée.

Enfin un peu de civisme ne ferait de mal à personne. Si chacun d’entre nous entretenait le petit bout de trottoir devant sa porte, ce serait déjà un pas de géant.

La Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), qui regroupe 82 municipalités, vient de terminer il y a un mois sa consultation publique sur la gestion des déchets. Un rapport doit être déposé d’ici la fin du mois et si Recyc-Québec donne son feu vert, le Plan métropolitain de gestion des matières résiduelles (PMGMR) 2024-2031 entrera en vigueur.

Mais les solutions contenues dans ce plan sont encore bien timides.

Il faut avoir le courage d’adopter la méthode forte si on ne veut pas que Montréal devienne carrément « la capitale des sacs-poubelle ».

1. Lisez « Le “Ghetto McGill” encombré de dépôts sauvages » Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion