C’est un revirement spectaculaire de voir l’actuel président américain, Joe Biden, passer deux jours à Ottawa et même s’adresser au Parlement.

Pensons à la façon dont son prédécesseur, Donald Trump, traitait le Canada.

Rappelons-nous comment il s’était comporté en goujat dans Charlevoix, dans le cadre d’une rencontre du G7 et, pire encore, après ce sommet. Il avait alors demandé à certains membres de son entourage d’attaquer publiquement Justin Trudeau.

Cette ère – complètement délirante – est terminée.

La relation entre nos deux pays est à la fois plus positive et productive.

Amen, voici Biden !

Mais penser que la chaleur de l’amitié entre Justin Trudeau et Joe Biden va venir à bout de TOUS les litiges et engendrer des solutions à TOUS les problèmes, c’est se bercer d’illusions.

Le chemin Roxham, par exemple.

Premièrement, ce n’est pas une priorité pour Joe Biden. Les migrants irréguliers qui entrent aux États-Unis à partir du Mexique sont nettement plus nombreux que ceux qui arrivent du Canada. Deuxièmement, trouver une solution au problème est loin d’être simple.

Cela dit, si un dossier litigieux chemine pendant que Biden est ici, ça pourrait bien être celui-là. « On va peut-être avoir quelque chose à annoncer », a lâché Justin Trudeau mercredi.

Si ça devait être le cas, ce serait un réel progrès. Et ça nous montrerait à quel point l’administration Biden est à l’écoute du gouvernement Trudeau.

Mais cette écoute à des limites, évidemment.

Ainsi, de toute évidence, on ne va pas régler à Ottawa d’un coup de baguette magique le vaste dossier du protectionnisme américain au cours des 48 prochaines heures.

Joe Biden ne va pas jusqu’à pourfendre l’accord de libre-échange entre nos deux pays – comme l’avait fait son prédécesseur. Mais le nationalisme économique demeure en grande forme à Washington parce qu’une bonne partie des électeurs y sont favorables.

Alors que le président démocrate cherchera à se faire réélire l’an prochain, il ne faut pas s’attendre à des miracles. Sauf qu’il faut continuer bien sûr à démontrer aux Américains que le protectionnisme – tel qu’il se manifeste par exemple dans l’Inflation Reduction Act, une législation adoptée en août dernier – n’est pas une bonne idée. Ni pour nous ni pour eux.

Cette loi, visant principalement à lutter contre les changements climatiques, aura un impact sur l’économie canadienne. Notamment parce que Washington se donne les moyens de privilégier les entreprises américaines dans le secteur de l’économie verte.

D’un autre côté, Justin Trudeau non plus ne dira pas oui à toutes les demandes des Américains.

La Maison-Blanche souhaite ardemment que le Canada prenne la tête d’une mission de sécurité en Haïti. On en discutera lors de la rencontre. Mais vous pouvez parier que le premier ministre canadien proposera certaines initiatives pour aider le pays… sans satisfaire la demande de Washington.

À Ottawa, on répète que la solution à la crise en Haïti doit provenir de la population haïtienne.

Parallèlement, Justin Trudeau tente d’atténuer les critiques de la Maison-Blanche en matière de défense en annonçant régulièrement divers investissements… sans jamais s’engager à atteindre la cible prévue par l’OTAN, c’est-à-dire 2 % de notre produit intérieur brut (PIB).

Même si atteindre cet objectif rapidement est illusoire, il est temps qu’on fasse preuve de plus de sérieux en la matière.

Mais répétons-le : Joe Biden n’est pas Donald Trump. Il ne va pas piquer une sainte colère parce qu’on ne fait pas ses quatre volontés.

Le président démocrate traite le Canada comme un allié important. Indéfectible.

Grâce à lui, notre relation avec les États-Unis est devenue stable. Prévisible.

On devrait être à même de le constater au cours des deux prochains jours.

On va assister à une célébration de l’amitié entre nos deux pays et on ferait mieux d’en profiter. Bien malin celui qui pourrait prédire l’issue de la présidentielle de 2024, alors qui sait combien de temps ça va durer…

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