La collaboration plutôt que la contrainte. La persuasion plutôt que le tordage de bras. Voilà l’approche que privilégient autant le gouvernement provincial que le gouvernement fédéral dans la gestion de l’épidémie de la COVID-19.

Tous les jours, de nouvelles directives sont données. Tous les jours, nos dirigeants à Ottawa et à Québec rappellent qu’ils ont le pouvoir d’imposer des mesures contraignantes, mais qu’ils refusent de les utiliser pour le moment. Ils font le pari de croire au nôtre : notre discipline collective.

Jusqu’à maintenant, force est de constater que la grande majorité des Québécois prend très au sérieux les recommandations de François Legault et du directeur de santé publique du Québec, Horacio Arruda. Depuis une semaine, il faut emprunter une autoroute à l’heure de pointe habituelle ou marcher dans une des grandes artères de Montréal pour constater que la plupart des Québécois ont profondément modifié leur comportement et se tiennent à distance les uns des autres. Une vie virtuelle s’est mise en place en moins de temps qu’il ne faut pour crier « Zoom » ou « FaceTime ». Cette adaptation est impressionnante.

Cependant, la fin de semaine a permis de réaliser que ce n’est pas toujours simple de suivre les consignes malgré une tonne de bonne foi.

Dès que le soleil s’est pointé le nez, le parc du Mont-Royal a été pris d’assaut par des milliers de marcheurs qui voulaient prendre l’air. Même situation dans les marchés publics ou au bord du canal de Lachine. Nous devons y voir une incitation à faire mieux.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

« Tous les jours, nos dirigeants rappellent qu’ils ont le pouvoir d’imposer des mesures contraignantes, mais qu’ils refusent de les utiliser pour le moment », souligne notre éditorialiste.

Un phénomène semblable a forcé les autorités françaises à fermer les plus beaux endroits de l’Hexagone, que ce soient les plages ou la promenade au bord de la Seine. Ces fermetures font partie d’une liste de mesures contraignantes imposées à toute une population pour faire respecter le confinement. 

En France, on ne peut plus sortir dans la rue sans une attestation de raison valable. Et les contrevenants payent le prix. Une première amende s’élève à 135 euros. À la quatrième offense, les récalcitrants reçoivent une amende de 3750 euros et sont passibles de six mois de prison. En Italie, où l’on compte les morts par centaines tous les jours, 40 000 citoyens ont reçu une amende dans la première semaine du confinement obligatoire.

Nous n’en sommes pas là et c’est tant mieux. Et collectivement, nous devrions tout faire pour l’éviter. C’est beaucoup plus inspirant de rester à la maison en se disant qu’on fait notre devoir de citoyen pour aplanir la courbe de la contagion que de se faire dire de rester entre quatre murs par ordre de l’État et de la police.

Se faire confiance mutuellement, c’est beaucoup plus propice à l’entraide et à la créativité –deux attributs dont le Québec ne manque pas ces jours-ci – que de se surveiller les uns les autres.

Bien sûr, il y a eu des petits écarts lors des premiers jours des mesures sanitaires. Certains ont été un peu durs d’oreille. Ces réticences initiales sont bien humaines : réagir à une pandémie, ça demande un temps de rajustement. Mais maintenant que le premier ministre Legault a annoncé que le Québec appuie sur « pause » pour les trois prochaines semaines, c’est le moment de montrer ce que nous pouvons être de mieux comme peuple : informés, patients, altruistes et disciplinés.

PHOTO GRAHAM HUGHES, LA PRESSE CANADIENNE

La Ville de Montréal a fermé toutes ses aires de jeu.

On s’évitera ainsi des mesures d’urgence contraignantes et anxiogènes. On s’évitera une police sur les dents et des scènes disgracieuses.

Car, paradoxalement, si nous voulons conserver nos libertés intactes, nous devons savoir quand ne pas les utiliser. Quand nous restreindre nous-mêmes. Même quand il fait beau. Même quand on se sent en santé.

Après la Seconde Guerre mondiale, le commentateur conservateur américain Cullen Hightower, champion des slogans, a écrit la phrase suivante : « La discipline sans la liberté, c’est la tyrannie. La liberté sans la discipline, c’est le chaos. » Et c’est exactement ce chaos dans les services de santé que nous voulons nous épargner. La vie de milliers de Québécois en dépend.

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