Nos lecteurs attendent avec appréhension le projet de loi sur le système de santé du ministre Christian Dubé. On se questionne notamment sur la nécessité de recruter des « top guns » du secteur privé pour diriger la future agence Santé Québec. Voici un aperçu des réponses à notre appel à tous de cette semaine.

Les « top guns » sont déjà là

Des « top guns », il y en a déjà dans le réseau public, j’en ai connu et j’en connais encore ! Commençons par dépolitiser les nominations, identifier les « top guns » déjà en place, leur confier des mandats objectivement réalisables et leur donner les conditions essentielles à la réussite. Parmi les « top guns », il y a, qu’on le veuille ou non, des représentants syndicaux qui savent ce qui pose problème et ont de véritables solutions à proposer. Parmi les « top guns », malgré toutes les manœuvres trop souvent mises en place pour « contrôler » leur travail… il reste quelques commissaires locaux aux plaintes et à la qualité des soins et services qui connaissent les droits des usagers et qui sont capables non seulement d’identifier les carences, mais aussi les solutions.

Micheline Charest

Trop de bureaucratie

Ajouter des morceaux de puzzle à l’immense structure organisationnelle de la santé ne fera qu’empirer les problèmes. Aucun de vos « top guns » du privé ne serait capable de gérer efficacement une organisation avec une bureaucratie accaparant plus de 50 % de ses ressources. Les urgences débordent et les infirmières sont à bout de souffle. La solution est simple, Monsieur le Ministre, investissez massivement dans le travail au front et réduisez considérablement toute cette bureaucratie qui s’embourbe dans sa paperasserie.

Gilles Dubé

Des gestionnaires de métier

Ce ministre me donne pleine confiance en l’avenir d’un système qui coûte si cher, et a certainement besoin de gestionnaires de métier au gouvernail. Nos grandes écoles d’administration devraient être mises au défi de créer le nouveau modèle tant recherché dans ce secteur. La parade des ministres-docteurs-libéraux a été un peu trop personnalisée et avait des airs d’autrefois où le médecin et le curé du village savaient ce qui était bon pour le peuple.

Guy Fortin

Une nouvelle structure qui voudra se justifier

C’est touchant de naïveté de penser qu’une nouvelle structure peut améliorer la façon de fonctionner du réseau. Les mêmes PDG, directeurs et adjoints de toutes sortes demeurent en place dans les CISSS et là, le ministre ajoute un autre niveau avec ses « top guns ». Tout ce beau monde va vouloir justifier sa raison d’être. Encore plus de données (chiffres) vont être exigées et ce sont les intervenantes et intervenants du réseau qui vont devoir les fournir, au détriment de leur travail auprès des gens.

Gilles Lapointe

Écouter les travailleurs avant tout

Non, ça ne m’inspire aucune confiance. Le réseau n’a pas besoin d’une structure administrative de plus, mais bien d’autonomie pour les établissements et de financement direct aux services aux patients. Comme pour le système d’éducation, on dirait que les messages qui proviennent du terrain ne se rendent jamais jusqu’aux décideurs, même s’ils sont martelés depuis des années. Il est temps d’écouter les travailleurs et de dégraisser les administrations.

Éliane Vincent, Saint-Pacôme

Du doigté svp

Je crois qu’il est requis d’avoir beaucoup de doigté pour revoir la structure de gestion du système de santé, qui en a bien besoin : revoir le rôle et l’autonomie des médecins dans le système, revoir la primauté de la porte d’entrée des hôpitaux par les urgences, mettre l’accent sur les soins à domicile… J’ai une grande considération pour notre ministre de la Santé, de par son approche de gestion et ses compétences de leader, mais j’ai des appréhensions sur le message actuel (« top guns » du privé). Il doit y en avoir au privé et au public, mais soyons exigeants et vigilants. Il y a beaucoup de choses à revoir et la machine de la santé doit pouvoir suivre.

Guy Morneau

Une bouchée à la fois

J’ai totalement confiance en M. Dubé. Comment mange-t-on un éléphant ? Une bouchée à la fois. Comment change-t-on une culture devenue trop rigide, qui fonctionne en silo ? On oblige les gens à rendre des comptes, on les sensibilise sur les objectifs, on recentre leurs efforts, on encourage les bons et on se défait des pas bons. Ça viendra.

Jacqueline Beaupré

Deux mondes

Au gré de mon expérience d’ex-banquier, d’ex-cadre de cégep et d’ex-enseignant universitaire, je puis avancer, sans crainte d’être taxé d’exagération, que toutes les stratégies du genre (embaucher des gestionnaires d’entreprises à but lucratif émérites pour gérer des organismes publics) ont été infructueuses. Pourquoi ? Tout bonnement parce que, tandis que la gestion d’entreprises privées est entièrement axée sur le rendement aux actionnaires (point final !), les organismes publics, eux, ne partagent pas cet objectif. La recherche du profit pour l’actionnaire et l’offre de services à la population sont irrémédiablement irréconciliables.

Luc Laporte

De gros doutes

Oh que j’ai de gros doutes par rapport à cela ! Espérons que les « top guns » en question auront la sagesse de consulter les « top guns » du milieu de la santé. Cette idée de M. Dubé ne me surprend pas. Il vient du milieu des affaires, où il a été entouré de gens brillants dans leur domaine respectif, mais il reste à voir si ce même succès s’appliquera à révolutionner le système de santé.

Hélène Paradis, L’Ange-Gardien