On apprenait récemment que des organismes comme Diabète Québec et ParticipACTION avaient sollicité - et obtenu - des sommes importantes de Coca-Cola pour faire la promotion de l'activité physique.

Selon Sylvie Lauzon, directrice générale de Diabète Québec (citée par Stéphanie Bérubé dans La Presse+ du 15 avril dernier), ce financement ne soulève pas de problème éthique puisque « ce ne sont pas les boissons gazeuses qui rendent les gens diabétiques comme ce n'est pas le fast-food qui rend les gens obèses ».

Avec ce message, la directrice générale se fait-elle la porte-parole de Coca-Cola, son bailleur de fonds ? Les centaines de milliers de diabétiques auraient certainement pu s'attendre à une position plus critique de la part de celle qui devrait représenter leurs intérêts.

En effet, l'argument de la directrice générale s'apparente étrangement à celui retenu par la National Rifle Association, le puissant lobby américain des armes à feu, qui répète, depuis des années, que ce ne sont pas les armes à feu qui tuent, mais bien les individus. Par cette affirmation, on nie le poids de la société pour ramener l'entière responsabilité des choix à chaque individu. Or, et parlez-en à n'importe quel publicitaire, nous sommes tous, individuellement, malléables et chacun de nos choix est le résultat d'une lutte constante entre nos besoins réels et ceux proposés par la société.

Le diabète de type II est une maladie génétique, mais aussi sociale. On le sait depuis longtemps.

L'alimentation et l'activité physique sont fortement influencées par les habitudes familiales, les amis, les collègues. Et ceux-ci, tout comme nous, sont soumis au matraquage incessant des marchands de sucre, de fast-food et d'aliments préparés. C'est donc sans surprise qu'on assiste, depuis quelques décennies, à une augmentation constante du taux de diabète de type II dans le monde à mesure que les modes de vie traditionnels sont remplacés par le consumérisme tous azimuts poussé, en bonne partie, par les firmes de communication et leurs clients.

Il serait tout simplement impossible d'expliquer l'épidémie mondiale de diabète de type II si nous avions, comme individu, la possibilité de choisir et d'agir en pleine connaissance de cause et complète indépendance.

Bien sûr, il n'y a rien de mal à promouvoir l'activité physique. Les études démontrent l'intérêt pour la santé de mener une vie active et de réserver un minimum de 150 minutes par semaine à des activités physiques intenses. Toutefois, et les données scientifiques sont claires à ce sujet, le diabète de type II est bien davantage causé par la présence de graisse abdominale et de surpoids que par une vie sédentaire.

UNE ASSOCIATION CONTRAIGNANTE

Malgré l'évidence scientifique, l'association de Diabète Québec avec Coca-Cola l'empêche de mettre l'accent sur la partie la plus importante du message de prévention : la lutte contre le diabète passe d'abord par un poids santé, qui s'acquiert et se maintient avant tout par une alimentation équilibrée et une résistance forte à la publicité omniprésente qui valorise les produits à faible valeur nutritive. Voilà qui explique peut-être aussi que le fait qu'il est possible de guérir du diabète de type II en perdant du poids - une donnée qu'on connaît depuis longtemps, comme je l'explique dans mon livre - soit ignoré par cette association.

Sommes-nous vraiment une société si riche que l'on puisse laisser, sans sourciller, Coca-Cola et ses consoeurs décider des messages de santé publique qui nous sont adressés par l'intermédiaire de groupes réputés, quels qu'en soient les coûts sociaux et de santé qui en découleront ? Poser la question, c'est déjà y répondre.