À la suite du dévoilement du rapport du BAPE sur la filière uranifère au Québec, je me réjouis de l'occasion pour rétablir les faits concernant la position de la Nation crie sur l'uranium et le projet Matoush.

Le projet Matoush de Ressources Strateco était situé en territoire cri sur les terrains de chasse familiaux de la Nation crie de Mistissini. Les gisements d'uranium que Strateco cherchait à exploiter se retrouvent à la crête de deux bassins qui apportent de l'eau à travers notre territoire d'Eeyou Istchee.

Les Cris d'Eeyou Istchee utilisent la totalité de ce territoire pour pratiquer nos activités traditionnelles. Nos ancêtres nous ont légué ce territoire, mais nous l'empruntons de nos enfants.

Nos communautés accueillent favorablement le développement responsable des ressources naturelles. Nous avons conclu plusieurs ententes avec des promoteurs, y compris pour de grands projets d'exploitation minière. Les faits sont éloquents à cet égard.

La notion du consentement sous-tend tous ces accords. Le consentement de la Nation crie est requis pour les importants projets de développement en Eeyou Istchee.

Ce principe, reconnu dans le Paix des Braves, constitue la pierre angulaire de la relation fructueuse de nation à nation entre les Cris et le Québec.

En vertu de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois (CBJNQ), il existe en Eeyou Istchee un régime particulier de protection de l'environnement et du milieu social. Ce régime exceptionnel vise la protection des Cris, de nos sociétés, nos économies et notre mode de vie. Il confirme notre statut particulier en Eeyou Istchee et reconnaît notre droit à une participation plus grande que celle normalement prévue pour le grand public dans des initiatives de développement sur notre territoire.

Cela signifie que nous avons notre mot à dire dans les activités de développement en Eeyou Istchee. Et, en refusant le permis de Strateco, le ministre de l'Environnent nous a écoutés.

Le ministre était pleinement dans son droit de refuser ce permis. Les Cris avaient - et ont toujours - des préoccupations légitimes quant à l'impact du développement de l'uranium sur nos terres, notre mode de vie et nos générations futures.

On a fait grand cas de la licence octroyée au projet Matoush par la Commission canadienne de sûreté nucléaire. La raison d'être de la CCSN est d'approuver, promouvoir et réglementer les activités nucléaires au Canada. La Commission a conclu que le projet Matoush satisfaisait aux normes qui ont été appliquées ailleurs quand l'exploitation uranifère a été autorisée.

La CCSN n'a pas le mandat d'examiner les droits particuliers des Cris et n'a pas l'autorité de décider si l'exploitation uranifère est acceptable pour la Nation crie ou pour Québec. Néanmoins, malgré son mandat limité, la CCSN a spécifiquement remarqué qu'il manquait au projet Matoush l'acceptabilité sociale de la part de la Nation crie, et a noté que cela devrait être abordé.

Le BAPE a confirmé la légitimité du rejet par la Nation crie du développement uranifère. Dès le début, la Nation crie a accueilli favorablement le processus du BAPE, parce que nous étions sûrs que, lorsque les Québécois apprendraient ce que nous savions au sujet de l'uranium, ils se tiendraient avec nous contre cette filière. Tandis que le BAPE n'a généralement pas de compétence en Eeyou Istchee, nous avons signé une entente avec le gouvernement du Québec qui a permis au BAPE d'inclure l'Eeyou Istchee dans son enquête. La commission du BAPE est venue à Eeyou Istchee à trois reprises, a tenu des audiences coprésidées par le Comité consultatif pour l'environnement de la Baie-James (CCEBJ) et a émis des recommandations concernant Eeyou Ischee cosignées par le CCEBJ.

Le rapport du BAPE et le refus du ministre d'accorder un permis à Strateco ne sont pas biaisés. Ils sont plutôt un symbole de ce qui peut être atteint au bénéfice de l'environnement et des générations futures lorsqu'une population se tient ensemble et s'exprime d'une seule voix.