La journaliste Daphnée Dion-Viens rapportait dans les pages du Journal de Montréal l'importante progression des taux de diplomation au secondaire en Ontario, ceux-ci étant passés en 10 ans de 64 % à 84 %. Pourtant, ce que d'aucuns ont qualifié de « miracle ontarien » se résume aisément : on y a amélioré la qualité de l'éducation en prenant appui sur des preuves, des données probantes et des connaissances issues de recherches scientifiques menées avec rigueur.

On a compris de l'autre côté de l'Outaouais qu'on ne dirigerait pas l'éducation ontarienne par sondages ou éditoriaux interposés en soumettant sa gouverne à la dictature du fait divers.

Pour imiter nos voisins ontariens, il faudrait d'abord s'éloigner des débats de structures qui ne changent rien à ce qui affecte vraiment l'apprentissage des élèves et reconnaître la place que tiennent les commissions scolaires dans l'amélioration de la réussite, ce que n'a pas abordé Mme Dion-Viens, étonnamment. Ainsi, plutôt que de dénigrer le travail des commissions scolaires, et à travers lui, celui des écoles publiques, on miserait sur ces structures intermédiaires comme l'a fait l'Ontario pour améliorer la diplomation et les taux de réussite de nos élèves, notamment en lecture.

L'Ontario n'a pas remis en question la légitimité de ses gouvernements scolaires régionaux ni celle de leurs élus.

Il est vrai toutefois que la participation aux élections scolaires y est plus élevée qu'ici, mais, faut-il le préciser, elles se tiennent en même temps que les élections municipales, comme c'est le cas pratiquement partout en Amérique du Nord. On a reconnu en Ontario que les commissions scolaires peuvent influencer positivement la réussite des élèves. Des recherches menées tant au Canada qu'aux États-Unis le démontrent clairement, preuves à l'appui.

POUR UNE DÉMARCHE SCIENTIFIQUE

L'idée même de prendre acte des résultats de recherche, de prendre des décisions fondées sur des preuves pour développer des politiques, diriger nos systèmes scolaires ou enseigner en classe ne fait que trop lentement son chemin au Québec. Elle demeure souvent le fait d'initiatives locales ou de projets à petite échelle. Mais là où de telles actions sont posées, les résultats sont généralement au rendez-vous.

On envie par exemple ces écoles ontariennes où les enfants apprennent très tôt les rudiments de la lecture, le nom et le son des lettres de l'alphabet en s'appuyant sur des activités à caractère ludique. Mais sait-on qu'au Québec de tels programmes ont été développés, validés rigoureusement et sont utilisés dans certaines écoles ? Sait-on que, loin d'en faire la promotion, de leur donner de la visibilité, on tente en certains lieux de les balayer sous le tapis ?

Je l'ai déjà écrit, mais je le répète : il est grand temps que le Québec se dote d'un Institut national scientifique d'éducation publique, politiquement neutre et indépendant, que nos ministres s'obligeraient à consulter avant de se lancer dans des initiatives à grande échelle. Parce que, oui, en Ontario, les gouvernements ont eu la sagesse de s'adjoindre des scientifiques chevronnés pour les conseiller sur la mise en place de leurs réformes. Au Québec, une telle façon de faire aurait évité qu'on investisse des centaines de millions dans des réformes, des politiques, des programmes ou des plans d'action dont l'impact sur la réussite restait à démontrer. Les exemples ne manquent pas.

Je voulais certes mettre en lumière la contribution « oubliée » des élus des conseils scolaires au « miracle ontarien », mais aussi faire état du peu de cas que nos décideurs font des données issues de la recherche. Quelles preuves de l'efficacité de leurs politiques et de leurs plans d'action en éducation nos gouvernements s'obligent-ils à nous donner ? Bien peu. Cela doit cesser.