Près de trois Québécois sur quatre ont acquis au moins un article d'occasion dans la dernière année. Un sur quatre, ou presque, prévoit même acheter des cadeaux de Noël de cette façon. L'usagé n'est plus seulement acceptable, il est bien vu, montre une toute nouvelle étude de l'Observatoire de la consommation responsable.

Si certains articles déjà utilisés, comme les chaussures, n'intéressent pas grand monde, le principe général suscite très peu de résistance. À peine plus d'un répondant sur 20 ne voudrait pas qu'on dise de lui qu'il achète des produits d'occasion, et seulement un sur 10 ne veut pas passer pour un radin ou une personne ayant des revenus modestes, montre le sondage réalisé à la fin septembre auprès d'un échantillon représentatif de 1104 personnes.

L'internet y est pour beaucoup. 8 acheteurs d'articles usagés sur 10 sont passés par un site comme Kijiji, eBay ou LesPAC - les trois plus populaires au Québec. Ces plateformes n'ont pas seulement facilité l'offre et élargi la demande. Elles présentent les objets dans un environnement neutre et aseptisé. On n'y trouve pas moins d'articles laids ou inutiles que dans une vente de garage ou un sous-sol d'église, mais l'espace est bien éclairé et ne sent jamais le renfermé.

Cette enquête, sans doute la plus exhaustive jamais réalisée sur la relation des Québécois avec le commerce de biens usagés en ligne, est étonnante à plusieurs égards. En particulier dans les justifications des répondants. À les en croire, l'argent n'est qu'une considération parmi d'autres. Certes, payer moins cher est l'une des motivations les plus évoquées, mais moins que le refus du gaspillage ou l'envie de faire un geste positif pour l'environnement. Et le désir de prendre ses distances avec la société de consommation suit de près.

Ceux qui vendent des articles usagés se montrent encore plus désintéressés: ils sont plus nombreux à vouloir prolonger la vie d'un produit et rendre service qu'à évoquer des motivations pécuniaires. Vraiment? Il y a toujours une part de désirabilité sociale dans la consommation responsable, convient le directeur de l'Observatoire, Fabien Durif.

Dans le fond, tant mieux si l'usagé est bien vu. La consommation de tels articles évite de les envoyer aux déchets et de gaspiller des ressources à en produire des neufs. Mais est-ce vraiment ce qui se passe? L'aspect «chasse au trésor» (trouver des objets originaux ou différents) est le troisième motif le plus cité par les acheteurs. On consomme autrement, mais consomme-t-on moins?

La même question se pose au sujet des vendeurs, dont la première motivation est de débarrasser la maison. Pour pouvoir faire de la place à d'autres achats? Cette enquête-là ne le dit pas, mais le sujet mérite d'être creusé. On saurait alors si cet engouement pour l'usagé est vraiment le signe d'une attitude plus responsable, ou seulement une manière de rendre la consommation plus acceptable.