Aujourd'hui, le monde scolaire est tapissé de carrés rouges, verts ou blancs, c'est selon. J'aimerais non pas rajouter une couleur ou m'associer à l'une d'elles, mais plutôt présenter la parole remplie d'espoir d'un parent dont la benjamine obtient son diplôme.

Je suis la fière maman de trois jeunes que j'ai accompagnés depuis la maternelle. Mon histoire en est une de fidélité et de longévité. Dix-sept ans que j'arpente les corridors des écoles pour les soirées d'information, la rencontre des bulletins, le portfolio - réforme oblige -, les spectacles: Le Petit Prince, Les anges de Noël et la fameuse brioche à la cannelle, où tu avais une grippe d'homme. Combien de fois ai-je fait le taxi pour les nombreux projets de sciences? Je t'ai vue grandir, affronter les difficultés avec les amis et ce soir, ils sont toujours là: Karine, Félix, Caroline et Louis. Mais pour moi, c'est mon ultime soirée, la remise des diplômes.

Enfin! pour toi.

Déjà! pour moi.

Je suis issue d'un milieu modeste, mais fier de ses valeurs et de sa culture. Quiconque me connaît sait que je doute fondamentalement, mais que j'ai une foi inébranlable en la vie. Et ce soir, quand je pose sur toi mon regard de parent heureux, je veux voir grand, car devant toi se tient la promesse d'un brillant avenir. Mais peut-être seras-tu de ce fleuve qui traîne longuement avant d'atteindre la mer? Sait-on jamais, ce sera ton choix, mais l'impossible recule quand quelqu'un avance. Lao Zi n'a-t-il pas dit qu'un voyage de mille lieues commence par un premier pas?

À la question existentielle de tout parent «que ferez-vous plus tard?», une seule réponse possible pour mes trois enfants très jeunes: «Vétérinaire.» Et moi qui demandais: «Mais alors, qui va me soigner?». Le lendemain, tu es venue me voir et tu avais la solution: «Maman, ne t'inquiète pas, je vais devenir vétérinaire, mais je vais marier un médecin.» Qui ou quoi viendra changer ton âme?

Tu n'es pas née pour te taire, comme ceux de toutes les nouvelles générations. Que feras-tu? Prendras-tu la parole ou baisseras-tu la tête devant ceux qui parlent haut et fort?

Les mots transmettent d'abord la culture, façonnent l'individu. Les Anglais s'entendent dire: be good (bon), les Allemands: sei brav (courageux), et nous les francophones: sois sage. Ne m'as-tu pas déjà dit: «Maman, le monde change. Tu dois changer avec.»

Tu as aussi appris à dire merci; pas du bout des lèvres, mais sincèrement pour montrer que tu apprécies ce qu'on te donne.

Les mots sont lourds de sens. Quelquefois, ils sont blessants, intimidants, mais ils paient aussi les pots cassés: j'oublie ce qui s'est passé, je te pardonne.

Dans les rassemblements, ils unissent: «So, so, so, solidarité.» Ils accueillent l'autre: «Bienvenue!» Ils donnent espoir: «Bonne chance! Bonne année!» Ils s'émeuvent, s'attendrissent: «Papa, avec toi, je vis des merveilles.» Ils sont quelquefois légers: «Salut!» Et ils bercent et endorment: «Bonne nuit!» Et finalement, ils décompressent: «Bonnes vacances.»

J'aimerais que ton regard se pose toujours vers les plus beaux horizons, mais quand tes yeux rougiront, - la vie n'est pas toujours un long fleuve tranquille -, je voudrais te laisser un passe-partout pour refermer n'importe quelle boîte de Pandore.

Ce passe-partout est un petit mot qui n'est pas full cool, comme tu le dis, mais tu sauras te le réapproprier, car il fait partie de ton éducation. Il t'accompagnera pour effectuer les tâches simples du quotidien, pour vivre des nuits magiques sans garde-fous, de folles aventures, de grands voyages et peut-être de grandes oeuvres.

Ce petit mot, on le chuchote, car sans lui, une fête, quelle qu'elle soit, est incomplète. Il fera partie de ton héritage, car il vaut son pesant d'or et ce sera mon mot de la fin.

Camille, Louis-Charles et Sophie, mes enfants, je vous aime profondément.