Voilà que le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) nous offre un autre rapport, mais que nous apprend-il ?

Pour les scientifiques et les décideurs publics : de cruciales précisions – telles que la capture du carbone n’est pas la panacée. Pour la population générale, honnêtement, pas grand-chose. Nous foncions dans un mur et le dernier rapport du GIEC nous rappelle que la collision est imminente.

Plus exactement, voici un court résumé : les changements climatiques sont principalement causés par les activités humaines ; le seul moyen d’éviter le pire des changements climatiques – soit de rester sous 1,5 °C – est de réduire de moitié nos GES dans la prochaine décennie et, finalement, nos politiques climatiques mises en place nous mènent vers une augmentation de 3,2 °C. On a Highway to Hell, dirait AC/DC.

Question de mettre le tout en contexte, une augmentation de plus de 1,5 °C est une (très) mauvaise nouvelle. Ainsi, une augmentation de la température mondiale de 2 °C met la vie sur Terre telle que nous la connaissons en péril, tandis qu’une augmentation de 3 °C est quasiment inconcevable au vu des risques géopolitiques qu’une telle hausse engendrerait.

L’Europe est déjà déchirée par une montée de la droite identitaire en réponse à l’immigration de masse. Pourtant, les maux que subit le tiers monde ne font que commencer. Les ouragans, les inondations et les sécheresses engendrent des famines et exacerbent les tensions ; 2022 n’est qu’un avant-goût.

Les terres rares que l’Afrique possède – combinées aux tensions sino-américaines – n’augurent rien de bon, le Moyen-Orient peut en témoigner.

Mais, au final, est-ce que le dernier rapport du GIEC améliore la connaissance du commun des mortels ? Pas vraiment.

Et est-ce que vulgariser l’impact des changements climatiques est vraiment la meilleure stratégie pour stimuler l’action climatique ? Une équipe de chercheurs s’est penchée sur la question1.Ils ont exploré l’impact de la communication sur l’adhésion aux politiques climatiques. Pour ce faire, l’équipe a sondé 40 000 individus dans 20 pays – dont le Canada –, représentant plus de 70 % des émissions mondiales de CO2.

Ils ont trouvé que l’impact marginal de la vulgarisation des changements climatiques n’augmente pas l’adhésion aux politiques climatiques. À l’inverse, ils ont trouvé que d’expliquer davantage les politiques climatiques – et plus exactement, comment les individus peuvent en bénéficier – augmente significativement l’adoption aux politiques climatiques2.

Face à ce constat, réaligner notre communication vers le fonctionnement et les bénéfices des principales politiques climatiques semble être la voie à prendre.

Prenons la Fonderie Horne en exemple. Les dommages sur la santé – et donc les bénéfices de s’attaquer à ce problème – ont été clairement communiqués. Les bénéfices étaient clairs, concrets et tangibles. Résultat : l’opinion publique a demandé des actions et le gouvernement a agi.

À l’opposé, le citoyen moyen ne comprend guère l’écofiscalité et nous lui demandons d'appuyer cette approche sans lui expliquer les bénéfices ? Ce n’est pas réaliste.

Reste que nous avons besoin de tels mécanismes. Or, comment les promouvoir ?

Je propose une solution bien radicale : en parler.

Les médias couvrent abondamment la crise climatique, mais se font plus discrets pour ce qui est des solutions et plus spécifiquement, de leur fonctionnement. En outre, le programme scolaire est déficient en la matière. À un tel point que certains s’indignent et lâchent l’école pour militer3.

Il est possible d’obtenir un diplôme universitaire sans jamais avoir été exposé aux principales politiques climatiques. C’est le plus grand défi de notre siècle ; c’est le défi que nous devrons résoudre et nous maintenons la relève dans l’ignorance. Le pire est que c’est également mauvais pour l’économie ; la demande pour les emplois verts croît plus rapidement que le personnel qualifié, exacerbant le problème de pénurie de main-d’œuvre.

En ce sens, les médias devraient inviter des experts afin de souligner l’importance de bonnes politiques publiques, mais également leurs fonctionnements.

Ces informations devraient être déclinées sur tous les médiums afin de rejoindre le plus grand nombre ; les journaux, radios et télédiffuseurs devraient consacrer des ressources au décryptage des politiques publiques. Au vu de l’évidente contribution au bien public qu’elles offriraient, ces ressources devraient être subventionnées.

Les dossiers de Philippe Mercure publiés dans le cahier Contexte de La Presse tels que « Objectif 100 TWh »4 ou « Pour une Révolution tranquille climatique »⁠5 devraient être la norme. Ces dossiers informent la population sur des enjeux importants, mais complexes.

Le sol s’écroule sous nos pieds et, par peur de tomber, nous en oublions les solutions.

Il faut réorienter le message dans les médias, dans les milieux de travail et à l’école, c’est primordial. Les bénéfices de l’action climatique doivent être mis de l’avant.

1. Lisez le rapport « Fighting Climate Change : International Attitudes Toward Climate Policies » (en anglais) 2. Lisez le texte « La communication en temps de crise climatique » 3. Lisez la chronique de Rima Elkouri « Alors que le monde brûle » 4. Lisez le dossier de Philippe Mercure « Énergie : objectif 100 TWh » 5. Lisez le dossier de Philippe Mercure « Pour une Révolution tranquille climatique » Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion