Depuis 40 ans, Hochelaga-Maisonneuve cherche désespérément à retrouver sa fierté d'antan. Jadis prospère, ouvrier et populaire, ce quartier montréalais est devenu un ghetto de pauvreté et de criminalité au tournant des années 80. Il a survécu grâce, entre autres, aux comités de citoyens qui ont su miser sur la solidarité et l'économie sociale.

Aujourd'hui, ces groupes communautaires s'attaquent à l'embourgeoisement d'HoMa. Hélas, ils se trompent de cible.

Le problème d'Hochelaga, ce n'est pas la mixité sociale ni l'embourgeoisement, mais le cercle vicieux de la pauvreté et de la misère.

Ce n'est pas du tout la richesse qui gangrène le quartier, mais la détresse visible à l'oeil nu d'une partie de sa population.

Bien sûr, les défenseurs d'Hochelaga doivent revendiquer l'accès aux logements sociaux et aux loyers abordables. C'est tout à fait légitime de « mettre de la pression » sur les gouvernements ou de manifester contre la multiplication des condos.

Or, cette lutte-là passe complètement sous le radar de graves problèmes du quartier. Comme la prostitution galopante, la toxicomanie croissante, la dépendance à l'aide sociale, le décrochage scolaire. Selon un profil sociodémographique de l'arrondissement de Mercier-Hochelaga-Maisonneuve, réalisé en 2011, seulement 49 % de sa population est titulaire d'un diplôme d'études supérieures ; chez les 15-24 ans, 36 % n'ont aucun diplôme ou certificat scolaire. Inquiétant.

Or, ce n'est pas en dénonçant les condos, les épiceries bios ou les boutiques artisanales qu'on va améliorer la qualité de vie du quartier. D'ailleurs, pourquoi ces militants anarchistes visent-ils les petits commerces indépendants et jamais les grandes chaînes de restauration rapide ? Pourquoi s'en prennent-ils aux fromageries, mais tolèrent-ils les crack houses et les piqueries qui ont pignon sur (presque) chaque rue d'Hochelaga ?

C'est beau de scander « À bas les condos ! », mais on aimerait aussi entendre des voix populaires s'élever contre le proxénétisme qui tue à petit feu des femmes vulnérables dans la zone rouge d'HoMa. Une dérive humaine plus problématique qu'un jeune couple qui achète sa première (co)propriété rue Dézéry.

La mixité sociale n'est pas seulement incontournable : elle est souhaitable pour la qualité de vie d'un quartier. Sinon, ce dernier se transforme en ghetto.

Regardez ce que sont devenus les house projects aux États-Unis et les HLM des banlieues en France.

Dans notre dossier sur Hochelaga-Maisonneuve, la députée de la circonscription, Carole Poirier, dit s'ennuyer du temps où les familles se réunissaient autour de la table de cuisine pour couper des légumes ! Désolé, madame la députée, votre nostalgie ne règlera aucunement la détresse physique, morale et économique des plus démunis.

Le meilleur exemple du nouveau Hochelaga, loin de la cuisine familiale, c'est la place Valois. Cet épicentre de « l'embourgeoisement » est devenu un espace ouvert et rassembleur pour TOUS les citoyens. Et sa boulangerie y vend des baguettes pratiquement au même prix que le pain Weston du dépanneur qui fait crédit aux familles endettées.

Par-delà la grogne populaire, pour aider Hochelaga, il faut redonner une fierté à ses habitants. Peu importe leur statut social.

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