C'est peut-être aux psychologues plus qu'aux spécialistes des relations internationales qu'il faudrait se fier pour tenter de prédire comment va se terminer le deuxième sommet Trump-Kim.

Le président américain a encore prouvé, récemment, à quel point il est obsédé par l'idée d'obtenir le prix Nobel de la paix. Si bien qu'on se demande s'il ne va pas oublier de mettre l'accent sur sa véritable priorité : réussir à faire prendre à la Corée du Nord le chemin de la dénucléarisation. C'est loin d'être chose faite, même si on a pu avoir l'impression que c'était réglé, la Maison-Blanche ayant tant vanté les mérites du premier sommet.

Dans le même ordre d'idées, Donald Trump a annoncé à la mi-février que sa candidature au Nobel a été parrainée par le premier ministre japonais, Shinzo Abe. Un quotidien du pays du Soleil-Levant a rapidement révélé que ce geste avait été fait... à la demande du président américain. Ça ne s'invente pas !

La question qui tue, maintenant, est celle-ci : jusqu'où ira Donald Trump afin de prouver que ce deuxième sommet avec le tyran nord-coréen s'achèvera de façon « vraiment extraordinaire », comme il l'a lui-même déjà proclamé ?

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Et si, simplement dans le but de crier victoire, Donald Trump allait jusqu'à « faire d'importantes concessions en échange de promesses creuses au sujet de la dénucléarisation » ? C'est ce qu'on suppute en coulisses à Washington. La nouvelle a été rapportée la semaine dernière par des journalistes de Politico.

Et ceux qui nourrissent de telles inquiétudes ne sont pas des démocrates qui, par pur esprit partisan, chercheraient à diaboliser le président. Non. On parle de membres de la garde rapprochée du président.

Le secrétaire d'État américain Mike Pompeo et le conseiller à la sécurité nationale John Bolton feraient partie de ceux qui pensent que Donald Trump pourrait se satisfaire de voir les Nord-Coréens jeter de la poudre aux yeux, si ça peut lui permettre de se pavaner comme un paon.

Ce qui fait peur à ces sceptiques, c'est que Donald Trump est capable de signer une déclaration officielle sur la fin de la guerre de Corée (cela n'a jamais été formalisé auparavant, malgré l'armistice... en 1953 !) même s'il n'obtient rien de concret en échange. Une page d'histoire, assurément, pourrait être tournée. Pourtant, ça ne changerait absolument rien au fait que la Corée du Nord représente bel et bien, de nos jours, une menace réelle.

Les tensions ont baissé d'un cran, c'est indéniable. Les deux hommes ne se disputent plus à savoir qui a le plus gros bouton nucléaire. Le régime de Kim Jong-un n'a pas repris ses essais nucléaires et a cessé de tester des missiles. Toutefois, le pays est loin d'avoir renoncé à ses ambitions nucléaires. Des experts estiment qu'il poursuit ses efforts en la matière. L'automne dernier, un institut de recherche de Washington a dit avoir découvert au moins 13 sites de missiles non déclarés sur le territoire nord-coréen.

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On se doutait bien que les Américains n'allaient pas pouvoir convaincre Kim Jong-un d'aller de l'avant avec une dénucléarisation « complète, vérifiable et irréversible », comme ils avaient dit le souhaiter.

Mais il faut maintenant aller plus loin que les bons mots prononcés lors du premier sommet entre les deux hommes. Convenir au minimum, par exemple, d'un gel du programme nucléaire et de moyens de vérifier si cet éventuel accord sera respecté. Faute de quoi, parler de victoire et de paix à l'issue de ce sommet serait prématuré.

Il faut bien sûr soutenir les efforts du président américain et souhaiter qu'ils portent leurs fruits. Et ne pas oublier que le président sud-coréen Moon Jae-in travaille d'arrache-pied, parallèlement, en vue d'une sortie de crise.

Mais il faut aussi garder les yeux ouverts et ne pas se laisser berner par le baratin habituel de Donald Trump au cours des prochaines heures.

Une note, en terminant, au sujet du prix Nobel. Le choix du lauréat annuel de cette prestigieuse récompense n'est pas toujours judicieux. L'accorder à Barack Obama au tout début de son mandat, par exemple, était pour le moins saugrenu.

Or, dans les circonstances actuelles, l'offrir à l'improbable duo Trump-Kim serait pire. L'un prend plaisir à déstabiliser l'ordre mondial, ayant même torpillé au passage l'accord sur le nucléaire iranien. L'autre, un despote notoire, est moins belliqueux qu'avant, mais demeure tout aussi menaçant. Il serait sage de s'armer de patience et d'obtenir des gages de leur sincérité avant d'en faire des héros.

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