Parmi les initiatives libérales des dernières années les plus difficiles à avaler pour les familles québécoises se trouve, dans le peloton de tête, celle de mettre fin au tarif unique dans les garderies subventionnées.

Philippe Couillard avait promis, lors de la dernière campagne électorale, de limiter l'augmentation des tarifs à l'indexation. Cet engagement a été brisé. Comment donner tort à ceux qui ont eu l'impression d'être trahis?

D'autant plus que le système qui a été mis en place - un tarif modulé selon le revenu des familles plus aisées - est extrêmement complexe. Sur papier, on peut en comprendre la logique. Mais en pratique, il donne des maux de tête à ceux qui y sont entrés bien malgré eux. Devoir payer une contribution additionnelle et voir son budget amputé après avoir rempli sa déclaration d'impôts, ça représente souvent un véritable casse-tête.

Il était donc évident que les partis de l'opposition allaient promettre de rétablir l'universalité du régime. Proposer du miel (le tarif unique) alors que le parti au pouvoir a offert du vinaigre aux familles concernées.

Le chef du Parti québécois l'a fait le premier : en début d'année, il a promis le retour au tarif unique pour le premier enfant. Le chef de la Coalition avenir Québec a fait la même promesse il y a quelques jours lors d'une entrevue à La Presse.

La disparition de ce qui avait été qualifié de «taxe famille» par ses détracteurs signifierait remettre, au minimum, 160 millions dans les poches des parents. On cible ici à la fois la famille et la classe moyenne. Une telle mesure produirait vraisemblablement l'effet escompté : un soulagement véritable.

Mais le débat sur les services de garde, qui occupera visiblement une place de choix au cours de la campagne électorale, ne doit surtout pas s'arrêter là ! Il faut miser sur la qualité. Elle est, selon l'Association québécoise des centres de la petite enfance, «littéralement en chute libre depuis 10 ans».

C'est pourtant un principe fondamental. Souvenons-nous que les interventions précoces pour inciter au développement des enfants favorisent leur réussite tout au long de leur cheminement scolaire. Il faut s'en préoccuper avant même que les enfants mettent les pieds à l'école. Qui dit réussite éducative dit services de garde éducatifs de qualité.

Ça aussi, ça doit à tout prix faire partie du débat.

En somme, lorsqu'on entendra un politicien prononcer les mots «tarif unique», il faudra aussi lui demander ce qu'il propose pour améliorer la qualité des services offerts aux enfants.

Lui demander, par exemple, s'il offrira de nouvelles places en CPE. Et, si oui, combien? Car on sait désormais que la qualité y est plus souvent au rendez-vous qu'ailleurs.

Ce sont les garderies non subventionnées où l'on retrouve le plus faible pourcentage d'établissements dont la qualité est «bonne ou excellente». Le hic, c'est que la bonification du crédit d'impôt pour les garderies privées encourage, depuis plusieurs années, un plus grand nombre de parents à opter pour ces établissements. Pour plusieurs familles, le coût final par enfant y est moins élevé. On a fait passer les finances de l'État avant le bien-être des enfants. Ce n'est pas la première fois, direz-vous. C'est vrai. Mais il est grand temps d'y remédier.

Jusqu'ici, c'est le Parti québécois qui semble être le plus conscient de ces enjeux et le plus enthousiaste quant au développement des CPE à l'avenir. Le Parti libéral, pour sa part, tente visiblement de redresser la barre. Il s'est déjà engagé à la création des quelques milliers de nouvelles places. Il a aussi promis que les services de garde seront gratuits pour tous les enfants de 4 ans. Mais il peut faire mieux. Quant à la CAQ, elle promet de ne pas rompre cet engagement libéral, mais elle ne semble pour l'instant, hélas, pas non plus avoir de préjugé favorable à l'égard des CPE.

Le parti de François Legault aurait par ailleurs tout avantage à s'inspirer de celui de Jean-François Lisée pour ce qui est d'élargir l'accessibilité aux services de garde, le coût étant un des obstacles qui empêchent encore trop de familles défavorisées d'entrer dans le système.

Le PQ souhaite permettre aux enfants des familles dont le revenu est inférieur à 34 000 $ d'accéder gratuitement à un service de garde. Et s'il promet un tarif unique de 8,05 $ par jour pour le premier enfant, comme la CAQ, il souhaite aussi alléger le fardeau des familles nombreuses. Pour un deuxième enfant, il n'en coûterait que 4 $. Et à partir d'un troisième, ce serait gratuit.

Le sort est bien loin d'en être jeté. Les débats ne font que commencer. Et les politiciens feraient bien de ne pas sous-estimer la grogne des parents et l'importance croissante accordée par les électeurs aux services offerts aux familles, à l'éducation, à la réussite... Bref, à l'avenir de nos enfants.

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