Ainsi, Donald Trump a lâché ses chiens.

Ce n'était donc pas assez de désavouer l'accord du G7 après l'avoir signé. Pas assez, non plus, de qualifier le premier ministre du Canada de «très malhonnête et faible».

Hier, deux des conseillers du président Trump ont attaqué le Canada et son premier ministre comme des chiens enragés.

Ils ont accusé Justin Trudeau d'avoir poignardé Donald Trump dans le dos lors de la conférence de presse finale du Sommet du G7. Le premier ministre a pourtant simplement répété qu'il juge «insultants» les tarifs imposés par la Maison-Blanche sur l'acier et l'aluminium du Canada au nom de la sécurité nationale.

L'un de ces conseillers, Peter Navarro, a dit qu'«il y a un endroit particulier en enfer» pour les dirigeants qui agissent comme Justin Trudeau. C'est carrément odieux.

Il a ensuite joué les vierges offensées. Donald Trump a fait «une faveur» à Justin Trudeau en acceptant de se rendre au Québec alors qu'il avait «des choses plus importantes» à faire, a soutenu le conseiller. Il a ajouté que le président américain «était même prêt à signer» le «communiqué socialiste» du G7. Socialiste!

On nage vraiment en plein délire.

Dans un monde ordinaire, un conseiller du président américain qui aurait tenu des propos similaires à ceux de Peter Navarro aurait été sommé de faire son mea culpa. Pas dans le monde de Donald Trump. Non. Dans ce monde, le président américain peut se montrer ignoble, grossier et méprisable avec n'importe qui. Mais dès qu'une de ses victimes ose lui faire des reproches, celle-ci doit être traînée dans la boue. Et si elle ne présente pas ses excuses, elle mérite d'être jetée dans les flammes de l'enfer.

Selon cette logique insensée, le deuxième conseiller du président américain qui s'est hier défoulé sur le dos du Canada, Larry Kudlow, a suggéré à Justin Trudeau de se rétracter. Il lui a même reproché d'affaiblir le président américain à l'approche du sommet avec la Corée du Nord!

Cette escalade verbale puérile et grossière dans laquelle s'est lancée l'administration Trump prendra fin sous peu, parce qu'Ottawa ne va pas renchérir. C'est certainement une sage décision. Premièrement, jeter de l'huile sur le feu ne mènerait à rien. Deuxièmement, le Canada a beaucoup à perdre.

Mais il faut tirer des leçons de ce qui vient de se passer et réfléchir à la façon dont les États-Unis traitent le Canada depuis le début de l'ère Trump.

Jamais dans l'histoire moderne du Canada la relation privilégiée que nous entretenons avec nos voisins américains n'a-t-elle été aussi menacée. Donald Trump, contrairement à tous ceux qui l'ont précédé au cours des dernières décennies, n'est pas un ami du Canada. Il ne nous veut pas de bien.

Il y a eu des moments plus difficiles entre les deux pays. Le président John F. Kennedy n'aimait pas le premier ministre John Diefenbaker. Richard Nixon tenait pour sa part, en privé, des propos injurieux au sujet de Pierre Elliott Trudeau. Et ce dernier avait dit qu'être voisin des États-Unis, c'était «comme dormir avec un éléphant». Il avait raison. Malgré tout, la relation entre les deux pays ne battait pas de l'aile.

Cette fois, ça semble différent. L'éléphant ne se contente pas de bouger et de grogner pendant son sommeil. Il nous fonce dessus.

La situation est encore plus sérieuse aujourd'hui qu'elle l'était il y a quelques mois. C'est que plusieurs conseillers plus modérés de Donald Trump ont quitté le navire. Et ceux qui restent ou qui les remplacent le sont, en général, beaucoup moins. Parmi la garde rapprochée du président, rares sont ceux qui désormais vont oser le mettre en garde contre le protectionnisme. Ou oser vanter les mérites du multilatéralisme.

Heureusement que Donald Trump et ses conseillers ne parlent pas au nom de l'ensemble des Américains. Nos alliés sont nombreux, même parmi les élus républicains. La mobilisation canadienne sur le sol américain doit se poursuivre.

Mais, dorénavant, une chose est claire. Tant et aussi longtemps que Donald Trump sera président des États-Unis, il faudra considérer que notre voisin est un rival plus qu'un ami (c'est de cette façon qu'il nous perçoit, visiblement). Et que notre relation avec lui, hélas, est une épreuve de force.

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