Il n'était pas le diable, comme certains l'ont longtemps prétendu avec entêtement. Y compris ceux qui se sont réjouis de le savoir mort et déversent leur fiel à son sujet depuis l'annonce de sa disparition.

À commencer par bon nombre de politiciens américains, qui ont mené contre Fidel Castro une guerre ouverte acharnée et contre-productive pendant plusieurs décennies.

Cette offensive aura notamment mené à cet inepte embargo commercial qui n'aura jamais eu l'effet escompté. Bien au contraire.

Elle aura aussi poussé la CIA à fomenter de multiples projets d'assassinat. Ceux-ci auront, comme l'embargo, uniquement contribué à renforcer le mythe, permettant à Fidel Castro d'affirmer qu'il avait échappé à « plus de 600 tentatives de meurtre ».

En revanche, il n'était pas non plus un saint, comme d'autres l'ont affirmé de façon si catégorique. Même si sa révolution a permis de renverser un dictateur corrompu, le général Fulgencio Batista.

Fidel Castro était peut-être véritablement « un homme habité par de nobles aspirations, par des idéaux de justice et d'équité », comme l'a écrit le journaliste Ignacio Ramonet, qui a publié une biographie du Líder Máximo sous forme d'entretiens il y a une dizaine d'années.

Mais si c'est le cas, le bilan de la révolution cubaine n'est certes pas ce dont il avait rêvé lorsqu'il a pris le pouvoir en 1959.

C'est vrai, le pays a fait, depuis, des avancées remarquables en matière d'alphabétisation, d'éducation, de santé. Le faible taux de mortalité infantile, par exemple, est souvent cité comme une des preuves du succès du régime.

Mais l'économie demeure anémique - et ce n'est pas uniquement la faute de l'embargo. La liberté et les droits de la personne ont par ailleurs été bafoués à répétition à Cuba depuis la fin des années 50.

C'est un grand paradoxe : Fidel Castro, le libérateur, a instauré un régime autoritaire et répressif.

D'ailleurs, dans l'ombre du « deuil national » qui vient de débuter, il ne faut pas oublier la douleur des victimes du régime et de leurs proches.

Depuis trop longtemps, le « projet socialiste cubain » imaginé et voulu par Fidel Castro est entré dans un cul-de-sac qui pousse les habitants de l'île, dont la plupart vivotent, à rêver d'un avenir meilleur.

Il aura fallu que Fidel Castro cède le pouvoir à son frère cadet, Raúl, à partir de 2006, pour que le pays se mette sur le chemin de la modernisation. Il faudra probablement attendre la retraite annoncée de ce dernier, en 2018, pour que le changement s'accélère.

Quant à la mort de Fidel Castro, espérons qu'elle permettra aux historiens de dresser un bilan de ce politicien et de son règne qui ira au-delà du mythe, de la légende. Un bilan qui ne sera forcément ni noir ni blanc, mais plutôt tout en nuances.

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