C'était, sans l'ombre d'un doute, une visite historique.

L'atmosphère était électrique.

À La Havane, capitale cubaine, des dizaines de milliers de personnes s'étaient massées sur la route empruntée par le véhicule dans lequel se trouvaient Trudeau et Castro.

On parle ici, bien sûr, de la première visite de Pierre Elliott Trudeau à Cuba, en 1976. Il était à l'époque le premier leader d'une puissance du monde occidental à visiter le pays depuis que Fidel Castro s'était emparé du pouvoir (en 1959).

La visite se voulait notamment un pied de nez aux Américains, qui étaient en guerre ouverte avec Fidel Castro.

Le bref séjour à Cuba de Justin Trudeau, mardi et mercredi, n'avait rien de frondeur, d'audacieux ou de remarquable. Cuba a pris la voie de la modernisation. Et les États-Unis, sous Barack Obama, ont renoué avec l'île des frères Castro.

Mais la visite de Justin Trudeau était néanmoins symbolique et importante.

D'abord parce qu'elle tombait à point nommé. La victoire de Donald Trump et le retour en force des républicains au Congrès américain n'augurent rien de bon pour la suite du dégel entre les États-Unis et Cuba.

« Pour moi, les résultats de l'élection aux États-Unis ne changeront pas les relations étroites entre le Canada et Cuba, basées sur l'amitié et le partenariat », a déclaré, fort à propos, le premier ministre canadien.

Ensuite parce que de telles visites sont indispensables pour maintenir de bonnes relations, particulièrement lorsque celles-ci ne vont pas toujours de soi. Lorsque, par exemple, ses interlocuteurs ne sont pas entièrement fréquentables.

Car bouder et punir Cuba, les États-Unis en ont fait la preuve au cours des dernières décennies, est tout simplement contreproductif. Et la politique de la main tendue donne déjà, elle, des résultats.

« La situation en matière de droits de la personne se trouvait à la croisée des chemins » à Cuba, a souligné Amnistie internationale dans son plus récent rapport annuel.

Justin Trudeau, poursuivant sur cette lancée, a notamment rencontré des représentants de la société civile, dont certains ont déjà été mis derrière les barreaux par le régime. C'était la chose à faire.

Une visite officielle à Cuba permet aussi au Canada de se positionner dans le peloton de tête des pays qui sont susceptibles de profiter des retombées du désir de changement manifesté par les autorités cubaines.

Même le gouvernement du Québec l'a compris. Philippe Couillard a été le premier de tous les premiers ministres du Québec à visiter Cuba de façon officielle, le mois dernier, avec une quarantaine d'entrepreneurs. Sa ministre des Relations internationales, Christine St-Pierre, prévoit ouvrir un bureau du Québec à Cuba au cours des prochains mois et mettre au point un « cadre de coopération » avec le pays.

En ce sens, que Justin Trudeau marche dans les pas de son père à Cuba, comme il l'avait d'ailleurs fait en Chine, est forcément positif. Au-delà de la nostalgie, de telles visites permettent de consolider la relation entre le Canada et ces pays. De redonner à Ottawa, lentement mais sûrement, la place qui lui revient sur l'échiquier international. Et de se distinguer de son puissant voisin qui risque fort, avec Donald Trump à sa tête, d'être nettement moins chaleureux à l'égard des régimes cubain et chinois.

Photo Fred Chartrand, archives La Presse Canadienne

Pierre Elliott Trudeau a été le premier leader d'une puissance du monde occidental à visiter Cuba depuis que Fidel Castro s'était emparé du pouvoir (en 1959), rappelle Alexandre Sirois.

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