Le gouvernement fédéral a annoncé lundi en grande pompe ses changements à la mission contre le groupe État islamique. En revanche, c'est sans tambour ni trompette qu'il a atténué, la semaine dernière, ses sanctions à l'égard de l'Iran.

Pourtant, la nouvelle mérite d'être ébruitée.

La décision, comme celle prise au sujet de la lutte contre le groupe État islamique, confirme l'adoption d'une nouvelle stratégie par Ottawa au Moyen-Orient. Elle démontre aussi qu'on assiste à un changement de cap aussi crucial que bienvenu du Canada en matière de politique étrangère.

Car, la levée des sanctions contre l'Iran doit être interprétée comme un désir de renouer avec le pays des mollahs, a affirmé le ministre des Affaires étrangères, Stéphane Dion. L'objectif, a-t-il dit, est maintenant de « rétablir les relations diplomatiques avec l'Iran ».

Une décision qui tombe sous le sens.

Ces dernières années, les autorités iraniennes ont signalé qu'elles étaient prêtes à mettre de l'eau dans leur vin au sujet de leur programme nucléaire, principal litige entre le pays et les grandes puissances occidentales.

L'administration américaine de Barack Obama a saisi la balle au bond. Elle a mis tout son poids dans la balance pour les convaincre de freiner leurs ambitions nucléaires. Le président américain a remporté son pari : une entente historique a été conclue en juillet dernier.

De nombreux acteurs majeurs de la communauté internationale renouent, depuis, lentement mais sûrement, avec l'Iran.

Y compris les États-Unis, qui ont levé les sanctions économiques contre le pays à la mi-janvier.

Le gouvernement Trudeau emprunte donc, ces jours-ci, le chemin tracé par Washington et ses proches alliés.

La décision des libéraux a néanmoins été dénoncée par les conservateurs à Ottawa, qui avaient suspendu les relations avec l'Iran en 2012. On aura compris que s'ils étaient restés au pouvoir, ils auraient continué à bouder le pays.

Ils ne se seraient malheureusement pas inspirés du succès de Barack Obama dans ce dossier, mais bien des erreurs de son prédécesseur, George W. Bush. Ce dernier avait refusé de dialoguer avec l'Iran. Selon lui, le pays faisait partie de « l'axe du mal », avec l'Irak et la Corée du Nord.

Les experts ont démontré, rétrospectivement, que cette attitude a été extrêmement contreproductive. Résultat : sous George W. Bush, les Iraniens ont fait progresser leur programme nucléaire et les politiciens les plus modérés au sein du régime ont été affaiblis.

Dans le contexte actuel, renouer avec l'Iran est, pour le Canada, logique. Et souhaitable.

Le seul point sur lequel les conservateurs ont raison, c'est lorsqu'ils disent qu'il est crucial de demeurer « sceptique ». C'est vrai, la lucidité est de mise.

Stéphane Dion a d'ailleurs indiqué que le Canada va tendre la main à l'Iran en gardant « les yeux grands ouverts » puisque subsistent « de graves inquiétudes sur les droits de la personne » dans ce pays. Tout comme sur le rôle que l'Iran joue actuellement dans la région. C'est primordial.

Mais garder les yeux grands ouverts et faire preuve de lucidité, c'est aussi comprendre qu'une politique étrangère efficace ne se résume pas à diaboliser tous ses ennemis.

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