Vendredi dernier, à Chennai, en Inde, la température a atteint 36 °C, quelques degrés au-dessus des normales de saison pour l’endroit.

C’est dans cette chaleur torride que les ministres de l’Environnement du G20, dont le ministre canadien Steven Guilbeault, étaient réunis. Et ils ont échoué à s’entendre sur un plan pour plafonner leurs émissions de gaz à effet de serre.

Peut-être aurait-il fallu couper la climatisation à ces dirigeants pour leur rappeler que, en dehors de leurs salles de conférence, le monde brûle ?

Les climatologues nous disent que le mois de juillet qui vient de prendre fin est le plus chaud depuis 120 000 ans. L’été 2023 sera celui où des millions de personnes sur la planète auront réalisé que les changements climatiques n’étaient pas qu’un concept théorique.

Il est facile de ne pas se sentir concerné par l’urgence climatique quand on entend parler de lointaines calottes glaciaires qui fondent.

C’est autre chose quand sa maison est emportée par les flots, quand les incendies de forêt rasent des centaines de milliers d’hectares et enfument l’air qu’on respire, quand la chaleur extrême mine la vie quotidienne.

Le moment commandait donc un passage à l’action. Le G20 a échoué à le saisir.

Les ministres présents à Chennai représentaient pourtant des pays qui, ensemble, émettent 80 % des gaz à effet de serre de la planète. Leur pouvoir est énorme.

Il a été rapporté que la Chine, la Russie et l’Arabie saoudite avaient contribué à bloquer les négociations. L’Afrique du Sud se serait ajoutée pour s’opposer à une proposition visant à tripler la capacité d’énergie renouvelable du G20 d’ici 2030.

Ceux qui suivent de près ces négociations expliquent l’échec par plusieurs raisons.

D’abord, certains pays, comme la Chine ou l’Afrique du Sud, considèrent le G20 comme une tribune économique et non comme un forum environnemental, et tiennent à discuter du climat dans les rencontres tenues sous l’égide de l’ONU.

Il y a aussi le fait que les ministres de l’Environnement qui étaient à Chennai n’ont pas les coudées franches, comme les chefs d’État. S’ils n’ont pas reçu le mandat de bouger, même les meilleurs jeux de coulisse n’y peuvent rien.

On peut se consoler en se disant qu’il reste des négociations à venir avant la prochaine grande conférence internationale sur le climat de l’ONU, la COP28, qui aura lieu à Dubaï en décembre.

Il faut toutefois tirer des leçons de l’échec du G20.

La principale est que l’hypocrisie sert très mal les pourparlers.

En négociation, chaque promesse non respectée suscite la méfiance, chaque inaction de l’un incite l’autre à ne rien faire, chaque contradiction sert à justifier les autres.

Or, des promesses non respectées, de l’inaction et des contradictions, il y en a à la pelle.

Un exemple : en 2009, les pays riches ont convenu de transférer 100 milliards US chaque année aux pays en voie de développement à partir de 2020 afin de les aider dans leurs actions climatiques.

Or, même si l’objectif semble enfin en vue, on en est seulement à 80 milliards US par année actuellement.

Côté hypocrisie, on a vu cette semaine l’Angleterre octroyer 100 nouvelles licences d’exploration pétrolière et gazière dans la mer du Nord. Le Canada fait la même chose : après avoir donné le feu vert au projet pétrolier Bay du Nord, le gouvernement fédéral a encore autorisé en juillet un nouveau forage exploratoire au large de Terre-Neuve1.

Difficile, après ça, d’avoir la légitimité de dire aux autres pays de faire le ménage chez eux.

Ceux qui se demandent pourquoi le Québec et le Canada doivent agir pour le climat alors que leurs émissions de gaz à effet de serre sont négligeables à l’échelle du globe ont leur réponse avec ce qui vient de se passer avec le G20.

Pour convaincre les autres d’avancer, il faut soi-même être en marche. Et les éléments qui se déchaînent autour de nous nous exhortent à accélérer le pas.

1. Lisez l’article du Devoir « Un nouveau forage pétrolier sera réalisé au large de Terre-Neuve » Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion