Question du jour : qu’est-ce qui représente 40 % de la masse terrestre du Canada, 75 % de son littoral, moins de 1 % de la population… et dont la sécurité est menacée ?

Si vous avez répondu l’Arctique, vous faites probablement partie de ceux qui se préoccupent de son sort. Tant mieux. La région a bien besoin qu’on se soucie de son avenir immédiat et qu’on renforce sa sécurité.

Un autre rapport en provenance d’Ottawa vient de nous le rappeler.

Après le Vérificateur général (fin 2022) et un comité de la Chambre des communes (en avril 2023), c’est au tour d’un comité du Sénat de sonner l’alarme.

La question de la sécurité et de la défense de l’Arctique doit être abordée par le gouvernement fédéral « avec toute l’urgence qu’exige la situation », lit-on dans ce document rendu public la semaine dernière.

Si ces plaidoyers successifs ne poussaient pas le gouvernement fédéral à s’empresser de revoir sa copie dans ce dossier crucial, ce serait profondément embarrassant.

Pourquoi la sécurité de l’Arctique est-elle aujourd’hui menacée plus qu’hier et – assurément – moins que demain ?

Soumettons, pour l’illustrer de façon imagée, deux éléments : un chiffre et une date.

D’abord le chiffre : 34,1 °C.

C’est la température qu’il faisait à Kuujjuaq mardi dernier. Le village du Nunavik était alors l’endroit le plus chaud au Canada !

L’évènement nous rappelle que le Nord canadien est particulièrement vulnérable aux impacts des changements climatiques. Si on parle spécifiquement de l’Arctique, la région se réchauffe trois fois plus vite que le reste de la planète.

C’est une préoccupation majeure pour ce territoire, ceux qui l’habitent et les infrastructures qu’on y trouve. Ça nous permet aussi de prédire que l’Arctique sera davantage convoité et que les activités dans la région vont continuer de s’intensifier.

Maintenant, la date : le 24 février 2022. Ce jour-là a marqué le début de l’invasion de l’Ukraine par le régime de Vladimir Poutine.

Le contexte géopolitique a changé. Le nationalisme des grandes puissances autocrates comme la Russie et la Chine est décomplexé. Et ces deux pays ont un intérêt certain pour l’Arctique, sur les plans stratégique et économique.

Attention, ça ne veut pas dire que le Canada fait face à une menace militaire imminente dans l’Arctique.

Mais comme l’a fait remarquer le chef d’état-major de la Défense, Wayne D. Eyre, si on veut se prémunir contre d’éventuelles menaces à notre souveraineté « dans les décennies à venir », c’est aujourd’hui qu’il faut investir.

Plusieurs suggestions ont été faites pour rehausser les capacités militaires du Canada afin de mieux protéger l’Arctique.

Dans leur rapport, les sénateurs ont tout particulièrement mis l’accent sur l’achat de nouveaux sous-marins. Le Canada en avait acheté quatre à la Grande-Bretagne en 1998. Ils étaient usagés et… de véritables citrons.

Il est urgent de les remplacer par des sous-marins qui vont permettre aux forces armées de plonger sous les glaces de l’Arctique, entre autres pour la surveillance et la dissuasion.

Si ce dossier devait subir le même sort que celui des CF-18 – qui vont être remplacés par des F-35 après d’interminables tergiversations –, ce serait épouvantable.

Les sénateurs ont offert plusieurs autres recommandations qui touchent directement le personnel et l’équipement nécessaire pour assurer la sécurité de l’Arctique.

Par exemple, instaurer un suivi du processus de modernisation du Commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord (NORAD), crucial notamment pour détecter les menaces aérospatiales – et éviter, on l’espère, de nouveaux épisodes embarrassants comme celui du ballon chinois.

Ou encore évaluer s’il faut modifier la taille, la nature ou l’emplacement des effectifs militaires canadiens dans l’Arctique.

On ne peut pas accuser le gouvernement fédéral d’avoir les bras croisés. Les 38,6 milliards annoncés pour le NORAD en sont une des preuves.

Cela dit, il lui manque un plan cohérent, doublé d’un échéancier, pour nous persuader que le sort de l’Arctique canadien est entre bonnes mains.

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