Les chiffres publiés mardi par le bureau de la vérificatrice générale ont de quoi décoiffer même ceux à qui il ne reste que quelques cheveux.

Premièrement, on a découvert que 4,6 milliards dollars ont été versés en trop à des Canadiens qui n’étaient pas admissibles aux prestations liées à la COVID-19 destinées aux particuliers.

Deuxièmement, on a appris que… c’est peut-être la pointe de l’iceberg !

La vérificatrice générale, Karen Hogan, a révélé que des paiements d’une valeur d’au moins 27,4 milliards versés à des particuliers et à des employeurs « devraient faire l’objet d’une enquête approfondie ».

Ça, c’est la mauvaise nouvelle. Nous y reviendrons. Mais parlons aussi de la bonne nouvelle, car les deux sont inextricablement liées. L’objectif des programmes fédéraux de prestations pour la COVID-19 a été atteint, a conclu la vérificatrice générale.

Elle a pris soin de le préciser à plusieurs reprises, mardi, lors de sa conférence de presse au sujet du rapport publié à ce sujet par son bureau.

On a examiné, dans ce rapport, six programmes de prestations liées à la COVID-19 – incluant la Prestation canadienne d’urgence (PCU) et la Subvention salariale d’urgence. Conclusion : ils ont permis au Canada d’éviter « une contraction plus sévère de l’économie et les conséquences sociales » comme une hausse de la pauvreté et des inégalités.

Pas question de jeter le bébé avec l’eau du bain. Les programmes, pour lesquels Ottawa a versé la somme colossale d’environ 211 milliards, étaient nécessaires, malgré certains effets pervers. Faut-il le rappeler, certains bénéficiaires ont été dissuadés de travailler, à l’époque, en raison des prestations.

Les programmes ont aussi été, en général, bien ciblés.

C’est donc principalement au chapitre de la reddition de comptes que le bilan est nettement moins reluisant.

Et c’est un euphémisme.

On comprend qu’il fallait faire un compromis lorsqu’on a conçu les diverses prestations, étant donné l’urgence de la situation, au début de la pandémie.

L’idée était de simplifier le processus afin d’offrir de l’aide le plus rapidement possible, et on a donc misé sur la bonne foi de ceux qui en faisaient la demande. Ce qu’on a gagné en vitesse, on l’a perdu en rigueur.

Il y avait des circonstances atténuantes. Mais cette situation particulière doit venir avec, après coup, des responsabilités particulières.

Si on s’entend que faire toutes les vérifications d’usage en amont est impossible, il faut serrer la vis en aval. Ça n’a pas encore été fait avec assez de poigne.

Le ministère de l’Emploi et du Développement social ainsi que l’Agence du revenu du Canada devaient mettre sur pied un vaste programme pour confirmer, après le versement des paiements, que les bénéficiaires étaient bel et bien admissibles.

Or, la vérificatrice générale déplore « le retard et la lenteur » de cette initiative. Elle reproche aussi au gouvernement de cibler un trop petit nombre de bénéficiaires pour ces vérifications.

C’est ce qui explique probablement pourquoi seuls 2,3 milliards ont été récupérés jusqu’ici.

Pourtant, le temps presse. En vertu de la loi, ces vérifications doivent être faites, en général, 36 mois après le versement des prestations.

Il faut donc appuyer sur l’accélérateur quant au processus de vérification et de recouvrement. En évaluant, bien sûr, le rapport coût-bénéfice de certaines de ces démarches. Et en réfléchissant à la demande faite mardi par le Nouveau Parti démocratique, qui réclame une amnistie pour les personnes à faible revenu.

On le dit souvent, il importe de tirer des leçons de la pandémie.

Il y a des mesures à prendre pour remédier aux problèmes ayant mené au gaspillage de millions de doses de vaccins contre la COVID-19 – le sujet d’un deuxième rapport publié mardi par la vérificatrice générale.

Mais Ottawa doit aussi trouver des solutions pour faire mieux en matière de gestion des finances publiques.

Maintenant que le pire de la pandémie est derrière nous, on est en droit de réclamer à la fois de l’efficacité ET de la rigueur.

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