Dans un contexte où son départ était inévitable, Dominique Anglade a pris la meilleure décision, tant pour elle que pour son parti. Elle a choisi d’arracher le diachylon d’un coup sec au lieu d’éterniser la souffrance.

Elle a agi avec classe. Saluons-le. Saluons aussi l’engagement et les accomplissements dans la vie politique québécoise de celle qui a marqué l’histoire comme étant la première femme noire à briguer le poste de premier ministre.

Si le départ de Dominique Anglade apaise les querelles intestines, il ne guérira pas le mal beaucoup plus profond dont souffre le Parti libéral du Québec (PLQ). Le parti reste aux soins intensifs. Quatrième au chapitre des suffrages exprimés aux dernières élections, avec à peine 14 % des voix, le PLQ a perdu son âme.

Qui remplacera la cheffe ? Ce n’est pas la question la plus urgente. Le parti peut très bien attendre à 2025, soit un an avant les prochaines élections, pour nommer un successeur au trône, en espérant qu’il y aura davantage de candidatures que lors de la nomination de Mme Anglade, qui s’était retrouvée sans concurrent.

Rien pour mousser l’image du parti.

Aujourd’hui, en 2022, quelle est la véritable pertinence du Parti libéral ? Voilà la question la plus cruciale à laquelle le chef par intérim devra trouver une réponse.

Au fil des ans, la « marque » libérale a été sérieusement amochée en raison des scandales de corruption, de la période de rigueur budgétaire difficile à avaler, de la réforme qui a fragilisé le réseau de la santé et, plus récemment, des tergiversations à propos de la réforme sur la langue française.

Pour se reconstruire, le PLQ doit revenir à ses valeurs fondamentales.

Il doit récupérer l’étiquette de « parti de l’économie » que lui a ravi la Coalition avenir Québec (CAQ).

Comment se distinguer du gouvernement ? En misant sur une économie du XXIe siècle qui fait la part belle à la transition énergétique (mais pas avec le plan ECO fondé sur l’hydrogène vert qui était mal ficelé) et qui s’assoit sur une gestion des finances publiques sage et responsable (bien loin des promesses de baisses d’impôt qui étaient mal avisées).

L’environnement est l’angle mort économique de la CAQ qui, on le sait, ne fait pas grand cas de la lutte contre les bouleversements climatiques. Le premier ministre François Legault brille d’ailleurs par son absence à la COP27.

Avec ce déni, il se place en marge des préoccupations du milieu des affaires qui a intégré depuis longtemps les principes environnementaux, sociaux et de saine gouvernance (ESG) dans ses activités.

Le gouvernement – qui perçoit l’immigration comme une menace – se trouve aussi en rupture avec le milieu des affaires pour qui l’ennemi numéro un est la pénurie de main-d’œuvre.

Au lieu de jouer sur la peur de disparaître, le PLQ peut faire la promotion d’une nation qui a confiance en elle et qui est capable d’avancer, en tendant la main à ses voisins, plutôt qu’en alimentant les querelles stériles.

Le Parti libéral peut miser sur un nationalisme d’ouverture, plutôt qu’un nationalisme de repli sur soi. Sur la fierté d’être Québécois, dans le respect des droits individuels, un des fondements du libéralisme.

Mais les libertés individuelles ne doivent pas éclipser la justice sociale, une autre valeur clé des libéraux. Sinon, on se retrouverait vite dans une « société égoïste » qui serait « livrée à la domination de ses membres les plus forts, au détriment de ses membres plus faibles », comme l’écrivait Claude Ryan, il y a 20 ans.

Dans un texte de 70 pages, l’ancien chef du PLQ mettait à jour les valeurs essentielles du parti, en se fondant sur les grandes réalisations du parti qui a bâti le Québec moderne avec la Révolution tranquille.

Le Parti libéral est mûr pour une nouvelle introspection s’il veut retrouver sa pertinence, son âme… et le cœur des Québécois.

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