Imaginez si on bâtissait la Baie-James dans votre coin de paradis. C’est un peu ce qui est en train de se produire avec la filière batterie qui carbure aux minéraux qu’on retrouve dans le sud du Québec.

Le premier ministre François Legault a beau dire qu’il n’y aura pas de développement minier sans acceptabilité sociale, la grogne continue de monter en région. Lundi, c’était au tour des citoyens de Lac-des-Plages, en Outaouais, de s’opposer à un projet d’exploration minière.

On les comprend.

Les foreuses sont déjà à l’ouvrage, sans qu’ils aient un mot à dire, car la Loi sur les mines est au-dessus de tout. Comme à l’époque des rois, cette loi archaïque prévoit que le sous-sol appartient à l’État, peu importe ce qu’il y a dessus.

N’importe qui peut acheter un claim qui lui donne le droit exclusif d’explorer le sous-sol sur un terrain déterminé de 400 sur 400 mètres. Quelques clics et une centaine de dollars plus tard, c’est réglé. Vous pouvez aller forer où bon vous semble !

Et si jamais vous faites une découverte, vous aurez le droit d’exproprier les résidants.

Jusqu’ici, les projets miniers, concentrés dans le nord du Québec, faisaient relativement peu de flammèches avec la population. Mais le développement de la filière batterie, projet phare de la Coalition avenir Québec (CAQ), change la donne, car les ressources nécessaires à la fabrication des batteries, comme le graphite et le lithium, se trouvent dans des régions plus densément peuplées. L’Outaouais, les Laurentides, Lanaudière…

D’un point de vue économique, la filière batterie fait rêver : cette nouvelle industrie pourrait rapporter 18 milliards de revenus par année. On ne peut pas lever le nez sur une telle manne, surtout qu’elle servira à propulser notre transition énergétique.

Mais si le virage vers les voitures électriques bousille nos milieux naturels, l’environnement n’en sortira pas gagnant.

Or, les règles actuelles ne sont pas suffisantes pour assurer un développement minier en harmonie avec les collectivités.

Depuis quelques années, la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme permet aux municipalités régionales de comté (MRC) de présenter à Québec un schéma d’aménagement pour délimiter les territoires incompatibles avec l’activité minière (TIAM).

Mais Québec rejette leur schéma à répétition. En Montérégie, par exemple, Québec refuse de protéger le mont Rigaud, ce qui est absurde.

Si Québec veut vraiment de l’acceptabilité sociale, il doit revoir ses orientations.

Pour mieux protéger les villégiateurs, il doit permettre aux MRC d’interdire l’exploration à moins d’un kilomètre des résidences et des lacs, alors que la limite est de seulement 600 mètres dans les zones semi-urbaines.

De plus, il serait sage d’imposer la tenue d’un Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE), peu importe la taille des projets. Sinon, les minières peuvent trop facilement contourner l’exercice, en morcelant leur projet.

Disons-le : une vraie consultation est à la base même de l’acceptabilité sociale. Car sans information, sans l’avis de véritables experts, on nourrit les craintes bien légitimes de la population.

En effet, de nombreuses questions se posent, même pour les citoyens qui ne sont pas collés sur une future mine à ciel ouvert.

Par exemple, l’exploitation d’une mine peut entraîner des changements à la nappe phréatique et ainsi tarir les puits artésiens des résidants du secteur. Quelle solution de rechange leur offrira-t-on ?

Et comment va-t-on gérer la circulation ? Va-t-on prévoir des voies de contournement pour éviter que les villages sur les routes de campagne ne soient dénaturés par le cortège de camions ?

L’idée n’est pas de bloquer les projets, avec une mentalité de « pas dans ma cour », mais de donner un rapport de force aux collectivités qui seront prises avec tous les inconvénients du développement minier, alors que Québec, qui contrôle les leviers, n’a que les avantages.

La vraie recette, c’est le travail d’équipe.

La preuve ?

En accordant aux communautés autochtones un droit de négocier avec les minières, on croyait que cela bloquerait le développement minier dans le nord du pays. Mais finalement, tout le contraire s’est produit. Les Autochtones y ont vu un moteur de développement économique, avec des emplois et des revenus à la clé.

Pourquoi ne pas s’en inspirer ?

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