Nous sommes en pleine crise du logement.

Ottawa veut payer 108 millions pour financer 5400 logements sociaux et abordables à Montréal. Comme il le fait dans toutes les grandes villes du pays en vertu d’un programme fédéral mis sur pied en 2018.

À Montréal, la Ville (la Société d’habitation et de développement de Montréal), des coops d’habitation et d’autres organismes ont envoyé leurs projets au fédéral. Ottawa les a évalués. A dit oui. Le chèque est signé.

Mais les travaux ne sont pas commencés à cause d’une énième chicane Québec-Ottawa, révélait lundi le journaliste Olivier Bachand, de Radio-Canada.

En vertu d’une loi québécoise, Québec doit approuver la très grande majorité des projets (5400 logements sur un total de 5900 logements abordables). Et ça niaise, comme on dit en bon québécois.

Le gouvernement Legault aurait aimé qu’Ottawa verse les milliards (sur 10 ans) de son Fonds national de co-investissement pour le logement (le FNCIL) sans condition dans les programmes provinciaux existants (AccèsLogis), en vertu de la compétence provinciale en matière d’habitation. De son côté, le gouvernement Trudeau veut verser l’argent directement aux responsables des projets qui lui sont soumis (Québec ne finance pas ces projets).

Québec a finalement cédé récemment, acceptant « de façon exceptionnelle » qu’un organisme fédéral (la SCHL) gère ce programme au Québec, explique le cabinet de la ministre Sonia LeBel.

Sauf qu’Ottawa et Québec discutent encore des gabarits de formulaires à remplir.

Ce n’est pas une blague.

Québec, qui doit approuver chaque projet en raison d’une loi québécoise, trouve les formulaires d’Ottawa compliqués et mal adaptés au droit civil.

La mairesse de Montréal, Valérie Plante, est découragée, et on la comprend.

Ça m’est complètement égal c’est de la faute à qui, je veux qu’ils s’assoient les deux dans une pièce puis qu’ils n’en sortent pas tant qu’ils n’ont pas trouvé de solution.

Valérie Plante

En effet, après quatre ans, le niaisage a assez duré.

Pendant qu’on discute de formulaires au Québec, le fédéral construit des logements abordables avec son programme à Toronto, Winnipeg, Calgary…

À Ottawa, on nous dit que Québec a commencé, au cours des dernières semaines, à donner son accord de principe à certains des projets à Montréal, sans pour autant signer le formulaire obligatoire de la loi québécoise.

En pleine crise du logement, Québec et Ottawa ont beaucoup mieux à faire que de continuer à s’obstiner sur des formulaires. Que les deux ordres de gouvernement jettent chacun du lest et s’entendent au plus vite sur les virgules de ces satanés formulaires. Et que Québec autorise (enfin) la construction ou la rénovation des 5400 logements abordables à Montréal, ainsi que les autres projets ailleurs au Québec qui sont aussi en attente.

Québec et Ottawa doivent s’entendre vite. Dans les prochaines semaines. Car après la mi-juillet, on s’approche dangereusement du début de la campagne électorale, où ce genre d’autorisations n’est généralement plus permis à Québec (c’est une zone grise).

De toute façon, les discussions devraient être terminées depuis longtemps.

En chiffres

13 milliards

Le programme fédéral du Fonds national de co-investissement pour le logement (FNCIL) prévoit financer des logements abordables à hauteur de 13 milliards sur 10 ans pour l’ensemble du pays. En proportion de la population, ça signifierait environ 2,9 milliards sur 10 ans pour le Québec. Le programme fonctionne toutefois selon les demandes et non en proportion de la population des provinces (c’est un des points que Québec aimerait changer, et le gouvernement Legault a raison là-dessus).

5900

Nombre de logements abordables dont Ottawa veut financer la construction ou la rénovation (145 millions de dollars) à Montréal, en vertu de son programme fédéral FNCIL. Sur ces 5900 logements, 5400 logements (108 millions de dollars) doivent être approuvés par le gouvernement du Québec en raison d’une loi québécoise. Sur ces 5900 logements abordables, on en construirait 1200 unités et on en rénoverait 4700.

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