Bon an, mal an, il arrive qu’une personnalité québécoise lance un cri du cœur à propos de l’école. Chaque fois, ces sorties publiques sont accueillies avec une brique et un fanal par une partie de la population.

On accuse ces personnalités de ne pas savoir de quoi elles parlent, de ne pas connaître « la réalité sur le terrain », de ne pas être un expert… On écoute à peine le message, mais on fustige le messager.

Récemment, le trio formé par Ricardo Larrivée, Pierre Thibault et Pierre Lavoie s’est fait critiquer pour son projet du Lab-École. On reprochait aux trois hommes de ne rien connaître à l’éducation, on s’est moqué d’eux, on les a traités de « gourous ».

Dimanche, c’était au tour de Gregory Charles de se prononcer sur l’école. Même genre de réaction épidermique dans les réseaux sociaux : « De quoi il se mêle, lui ? »

Il vaut la peine d’expliquer comment Gregory Charles en est venu à faire partager ses idées dans les écrans de La Presse. C’est le journaliste Alexandre Pratt qui l’a contacté pour lui parler des différences générationnelles dans les différentes cohortes qui ont suivi ses cours de chant et de musique. L’entrevue devait être publiée dans le cadre de la rubrique « Un café avec… », qu’on peut lire tous les dimanches dans nos écrans. Sauf qu’au fil de la discussion, le sujet des décrocheurs est arrivé sur la table. Gregory Charles leur a longtemps enseigné. Il a donc partagé ses nombreuses réflexions sur l’éducation des garçons. Et il a lancé quelques propositions. Au total, l’entrevue a duré 2 h 30 min ! Le journaliste a trouvé que le point de vue de M. Charles était suffisamment intéressant pour y consacrer tout un dossier.

Gregory Charles n’a pas lancé de programme politique. Il n’a pas posé sa candidature comme prochain ministre de l’Éducation. Il n’a jamais prétendu être un expert. Mais il a tout de même plusieurs années d’enseignement de la musique et du chant derrière la cravate. Il a enseigné à des décrocheurs. Et il est le père d’une fillette qui fréquente l’école. Des expériences qui lui donnent une certaine crédibilité quand il parle d’éducation.

Les solutions de Gregory Charles sont-elles toutes excellentes ? Non. Et le principal intéressé ne le prétend pas non plus. Ce sont des idées lancées sur la place publique qui peuvent servir de point de départ à une conversation.

Par exemple, on peut penser que séparer les garçons des filles – une idée que l’animateur avait déjà lancée à l’émission Les francs-tireurs en 2015 – va à l’encontre des efforts de diversité et d’inclusion mis de l’avant dans la société québécoise. Mais il n’est pas interdit d’en débattre pour autant. Tout comme il est intéressant de poursuivre la réflexion sur le décrochage des garçons, puisque notre système d’éducation n’a toujours pas réussi à régler ce problème.

Quand Gregory Charles dit que les horaires des écoles sont dictés par ceux des compagnies de transport, ou que les enfants manquent de motivation en janvier, il a raison. Est-il possible d’en parler sans déchirer sa chemise ?

La réflexion autour de l’école québécoise n’est pas réservée aux seuls professeurs syndiqués possédant un brevet d’enseignement ou aux fonctionnaires du ministère de l’Éducation.

C’est une question fondamentale qui touche l’ensemble de la société québécoise et nous avons tous voix au chapitre.

Bien sûr, on peut se désoler qu’un professeur avec 30 ans d’expérience et des idées plein la tête ne jouisse pas d’une tribune aussi visible que celle qui a été offerte à Gregory Charles. On discutera une autre fois des privilèges rattachés à la célébrité, ce n’est pas ce dont il est question aujourd’hui.

Il est question d’accueillir les déclarations de Gregory Charles pour ce qu’elles sont : des idées à propos d’un sujet qui lui tient à cœur, l’éducation. Reste à voir ensuite si certaines propositions méritent d’être retenues. Pour ça, il faut avoir l’espace pour en discuter sans sauter à la gorge du messager.

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