Vous avez l’impression que votre portefeuille refoule à vue d’œil ? Ce n’est pas une illusion.

La nourriture, le logement, les meubles, les voitures, l’essence… C’est fou comme tout coûte plus cher. Encore plus que prévu, car la hausse fulgurante de l’inflation a dépassé toutes les attentes pour atteindre 6,7 % en mars au Canada, un sommet depuis 1991.

C’est du sérieux.

Mais pour venir en aide aux consommateurs dont le pouvoir d’achat s’érode dangereusement, les gouvernements auraient mieux à faire que de lancer des mesures électoralistes comme ces dernières semaines.

Au Québec, le gouvernement a offert 500 $ à tous les contribuables gagnant moins de 100 000 $, un cadeau qui a certainement aidé la Coalition avenir Québec (CAQ) à percer le château fort péquiste lors de l’élection partielle dans Marie-Victorin. Et qui ne nuira pas non plus pour les élections générales d’octobre prochain.

De son côté, l’Ontario a décidé de récompenser les automobilistes en annulant les frais d’immatriculation rétroactivement sur deux ans. Triste pied de nez pour tous ceux qui utilisent les transports actifs. De beaux chèques allant jusqu’à 220 $ par véhicule arrivent maintenant par la poste… alors que le premier ministre Doug Ford sollicite un deuxième mandat, en juin prochain.

Il n’y a pas de hasard.

Puis en Alberta, le premier ministre Jason Kenney, qui joue présentement son avenir politique dans un vote de confiance, a décrété une baisse temporaire de la taxe provinciale sur l’essence.

Et tant pis pour l’environnement !

On ne peut pas en vouloir aux gouvernements d’aider les ménages, en particulier les plus démunis qui sont davantage touchés par l’inflation. Mais en leur envoyant de l’argent – à crédit, puisque les finances publiques sont dans le rouge –, les politiciens ne font qu’enflammer l’inflation davantage.

Tout ça est contre-productif.

Avis au premier ministre François Legault qui affirmait mercredi qu’il « faut continuer à aider » les consommateurs : il existe une manière simple de leur redonner du pouvoir d’achat. En prime, ce serait bon pour l’environnement. Et le plus beau de l’affaire : ça ne coûterait pas un cent à l’État.

La recette ? Lutter contre l’obsolescence programmée, c’est-à-dire le fâcheux stratagème visant à réduire délibérément la durée de vie d’un produit pour en forcer le remplacement hâtif.

Tous ces produits qui se brisent trop vite et qui sont impossibles à réparer vident nos portefeuilles et remplissent nos dépotoirs. D’ailleurs, le Québec est le cancre des déchets résidentiels, avec une croissance de 53 % par personne entre 2002 et 2018, contre seulement 9 % au Canada1.

Ce gaspillage est une honte. Il faut agir.

Depuis 2015, la France dispose d’une loi contre l’obsolescence programmée. Apple a d’ailleurs été condamnée pour ne pas avoir informé les détenteurs d’iPhone qu’une mise à jour allait ralentir leur appareil.

Au Québec, une pétition de 45 000 noms et un projet de loi ont été déposés en 2019 à l’Assemblée nationale. L’Office de la protection du consommateur (OPC) a ensuite mené des consultations. On souhaitait notamment informer les consommateurs de la durée minimale de fonctionnement des produits et de la possibilité de les réparer, pour qu’ils fassent des achats plus éclairés.

Mais depuis… silence radio.

Manifestement, la défense des consommateurs n’est pas la priorité du ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, qui peine à faire adopter la réforme du droit de la famille et le projet de loi 96 sur la langue française, avant les élections.

Dans le passé, on a constaté qu’un ministre dédié à la consommation permettait de faire avancer plus rondement les dossiers qui, désormais, restent coincés dans les classeurs de l’OPC.

Dommage, dommage. Il y a tant de choses à faire pour aider les consommateurs, notamment en assainissant le crédit destiné aux personnes vulnérables qui auront la remontée des taux d’intérêt dans les dents.

Mais aussi les pratiques du côté automobile. Des exemples ? Interdire les frais déraisonnables au retour d’un véhicule loué. Limiter la durée du financement qui atteint parfois huit-neuf ans, ce qui encourage les gens à acheter plus gros et plus cher.

Voilà de vraies bonnes façons pour que les consommateurs en aient plus pour leur argent.

1. Consultez un mémoire soumis au Bureau d’audiences publiques sur l’environnement Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion