Les mesures contre la COVID-19 tombent les unes après les autres au Québec. Si bien qu’aujourd’hui, il n’est pas interdit de danser dans un rave le samedi et de visiter un ami qui lutte contre un cancer le mardi.

De vous rendre au bureau alors que vos deux enfants sont infectés.

D’embrasser grand-maman avec la gorge qui pique et le nez qui coule sans avoir passé de test rapide.

Si ces choses sont permises, ça ne veut évidemment pas dire qu’elles sont intelligentes.

Comme à bien des endroits, le Québec passe d’une gestion coercitive de la COVID-19 à une approche de responsabilité individuelle. « On n’en veut plus, de mesures populationnelles », a lancé le ministre Christian Dubé en conférence de presse, mercredi.

Difficile d’être plus clair : le gouvernement ne souhaite plus jouer les shérifs pour gérer la pandémie.

Cette transition, nous l’aurions souhaitée plus graduelle. Il aurait été prudent de mesurer les effets d’un allègement avant d’en instaurer trois autres.

Lisez « Relâcher sans déraper »

Le gouvernement fait déjà miroiter la fin du masque obligatoire à peu près partout, par exemple, alors qu’on ne connaît pas encore les effets de la semaine de relâche, de la levée du passeport vaccinal, de la fin du masque en classe et de l’ouverture des bars et restos au maximum de leur capacité.

Quelle urgence y avait-il à télégraphier une telle annonce ? La Santé publique aurait pu visionner les épisodes « Noël 2020 » et « Noël 2021 » pour se remémorer le risque d’annoncer des allègements trop à l’avance.

C’est d’autant plus vrai que les hospitalisations repartent à la hausse dans certains pays européens et que la possibilité d’une sixième vague chez nous est réelle, même si les prévisions suggèrent qu’elle serait moins prononcée que la cinquième.

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Cela dit, même si on peut remettre son rythme en question, ce transfert de responsabilités du gouvernement vers les citoyens est souhaitable. L’État ne peut quand même pas dicter indéfiniment combien de convives vous pouvez inviter à souper.

Mais ce changement de rôle implique une prise de responsabilités de la part de la population. On en parle trop peu.

Les allègements actuels suscitent une euphorie drôlement bienvenue. Mais ils rendent aussi la société plus dangereuse pour beaucoup d’entre nous. Cela inclut les aînés, les immunodéprimés et les gens qui souffrent de comorbidités comme le diabète et l’obésité.

Ajoutons que chaque individu a sa propre façon de gérer le risque. Au bureau comme dans l’espace public, il ne faudrait pas que les plus prudents deviennent ceux qui se font regarder de travers. Parce que, oui, le danger existe encore.

La COVID-19 n’est plus la faucheuse qu’elle était il y a deux mois. Mais à 50 morts par semaine, elle s’inscrit néanmoins dans les dix plus grandes causes de mortalité au Québec, quelque part entre le cancer (environ 400 morts par semaine) et les suicides (environ 20 morts par semaine).

Tout en profitant de notre liberté retrouvée, on aurait ainsi intérêt à penser aux autres ces jours-ci. En fait, c’est une nouvelle forme de civisme qu’on souhaite voir s’implanter.

On sait déjà que les vaccins et les tests rapides sont des outils puissants pour réduire le risque pour nous et pour les autres. C’est aussi le cas du masque. Ce n’est pas parce qu’on annonce la fin de son port obligatoire que ses bienfaits deviennent soudainement caducs.

Dans ce changement d’approche, la Santé publique ne peut pas non plus se désengager. Son rôle ne sera plus de recommander des contraintes, mais d’informer et de sensibiliser.

Quels comportements sont les plus à risque ? Quelles comorbidités vous rendent plus vulnérables à la COVID ? Dans quels contextes le masque et les tests rapides sont-ils les plus utiles ? On a besoin de réponses claires à ces questions.

Les Québécois ont montré qu’ils pouvaient prendre soin les uns des autres pendant la pandémie. Cette attitude n’a pas à tomber avec les allègements.

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  • 73 %
    Proportion des Canadiens qui soutiennent encore le port du masque dans les espaces publics intérieurs
    Source : Angus Reid