Ainsi, Donald Trump a annulé la conférence de presse qu’il souhaitait tenir en ce 6 janvier 2022, jour du premier anniversaire de l’insurrection à Washington.

C’est une bonne nouvelle.

Le président (dument élu) Joe Biden va plaider, à l’occasion d’un discours qui se voudra rassembleur, pour le renforcement de la démocratie sur le sol américain. On a aussi prévu un moment de recueillement sur les marches du Capitole.

Tout ça est nécessaire.

Donald Trump, pour sa part, voulait alléguer publiquement, à peu près au même moment, que si l’élection n’avait pas été truquée, il serait aujourd’hui encore président.

Ce duel délirant n’aura donc pas lieu et c’est tant mieux.

Sur la forme, à tout le moins. Car sur le fond, ça ne change hélas pas grand-chose.

PHOTO MANDEL NGAN, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Donald Trump, ancien président des États-Unis

Le problème, qui reste entier, a été résumé de façon claire et limpide dans le plus récent numéro du magazine The Atlantic : « Donald Trump est actuellement mieux positionné pour renverser une élection qu’il ne l’était en 2020. »

Depuis plus d’un an, l’ancien président répète que l’élection lui a été volée. Et cette opération lavage de cerveaux a si bien fonctionné que plus des deux tiers des républicains en sont encore persuadés.

On parle de 71 % des républicains, selon un récent sondage ABC News–Ipsos effectué à la fin du mois de décembre.

Ce mensonge gros comme le bras, à force d’être répété, est donc devenu une vérité pour des dizaines de millions d’Américains.

C’est d’autant plus inquiétant qu’on ne voit pas ce qui pourrait atténuer le ressentiment de ces Américains.

C’est de bien mauvais augure pour notre puissant voisin.

Violence contre le gouvernement

Il faut aussi savoir qu’un sondage The Washington Post–Université du Maryland, dont les résultats ont été diffusés le 1er janvier, révèle que 34 % des Américains estiment désormais que la violence contre le gouvernement peut, dans certaines circonstances, être justifiée.

Un changement notable puisque dans les années 1990, 90 % des Américains jugeaient que la violence contre le gouvernement n’était en aucun cas justifiable.

On se retrouve donc à discuter très sérieusement, en ce début d’année 2022, du jour où on pourrait voir la démocratie américaine s’éteindre.

Et pire encore : de la possibilité d’une guerre civile !

On ne va pas jouer les prophètes de malheur et prédire qu’un conflit armé chez nos voisins est imminent. Mais force est de reconnaître que dans les circonstances actuelles, ce n’est pas farfelu. Et que les arguments de ceux qui tentent de nous mettre en garde sont valables.

Comme ceux de Barbara F. Walter, qui enseigne la science politique à l’Université de la Californie à San Diego, et qui publie ces jours-ci un livre intitulé How Civil Wars Start.

« Si vous étiez un analyste d’un pays étranger qui examine les évènements en Amérique – de la même façon que vous pourriez examiner les évènements en Ukraine, en Côte d’Ivoire ou au Venezuela – vous auriez une liste pour évaluer chacune des conditions qui rendent une guerre civile possible. Et vous découvririez que les États-Unis, une démocratie fondée il y a plus de deux siècles, viennent d’entrer sur un terrain très dangereux », a-t-elle expliqué récemment au chroniqueur du Washington Post Dana Milbank.

L’avenir des États-Unis

L’écrivain canadien Stephen Marche vient pour sa part de publier un essai intitulé The Next Civil War, dans lequel il élabore une série de scénarios apocalyptiques allant de l’assassinat d’une éventuelle présidente des États-Unis à l’impact catastrophique de l’explosion d’une bombe sale (contenant des matériaux radioactifs) à Washington.

Ces scénarios peuvent souvent sembler tirés par les cheveux, mais l’essai est instructif et les avertissements de l’auteur quant à l’avenir des États-Unis devraient néanmoins nous faire réfléchir.

Les gouvernements étrangers doivent se préparer à une Amérique post-démocratique, une superpuissance autoritaire et, par conséquent, moins stable.

Stephen Marche, écrivain canadien

Ou encore à un pays « tellement absorbé par ses crises qu’il ne parvient plus à concevoir et encore moins à adopter des politiques intérieure ou étrangère ».

Entendons-nous bien : il serait grandement prématuré d’annoncer la mort prochaine de la démocratie américaine.

Nous aurions toutefois tort, de ce côté-ci de la frontière, de penser que c’est inconcevable et de ne pas nous préparer à faire face à une telle éventualité.

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