Le scénario va comme suit. Première scène : un projet de train rapide, le Réseau express métropolitain (REM), doit relier le centre-ville de Montréal à l’aéroport international. Il suscite l’enthousiasme de tous.

Mais voilà, dans la deuxième scène, ça se corse. Les diverses instances impliquées ne s’entendent pas sur qui doit signer les chèques. Ça tergiverse. Le tout met le projet en péril.

Ce scénario vous dit quelque chose ? C’est celui qui est en train de se dérouler sous nos yeux. Afin de réaliser la station du REM à l’aéroport Trudeau, Aéroports de Montréal (ADM), qui gère l’infrastructure, demande aux gouvernements de lui consentir des prêts de 600 millions. Prêts qui seront remboursés plus tard, quand le trafic aérien se sera rétabli après la fin de la pandémie. Là, on est au milieu de la scène où les prêteurs potentiels – Québec, Ottawa et la Banque de l’infrastructure du Canada (BIC) – se renvoient la balle.

Un mauvais remake

Le hic, c’est que ce bras de fer auquel nous assistons est un remake d’un autre film des années 1970. Les deux premières scènes sont les mêmes. Un seul protagoniste a changé. L’aéroport ne s’appelait pas Trudeau, mais Mirabel. Même le nom du réseau de train était le même, le REM. Ça ne s’invente pas.

Et vous connaissez la fin de ce film ? Les diverses autorités ne se sont pas entendues et le train n’a jamais vu le jour.

L’aéroport de Mirabel a souffert de son manque de liaison avec le cœur de la métropole. Et cette lacune a contribué à ce que trois décennies plus tard, un des aéroports les plus d’avant-garde de la planète a été mis sur la voie de service, puis carrément abandonné.

Alors, plus de quatre décennies plus tard, on n’a pas du tout envie de revivre la même fin catastrophe. Les conséquences sont trop graves pour toutes les parties impliquées. Et doit-on rappeler que le REM actuel a d’abord été conçu pour relier l’ensemble de la région métropolitaine à l’aéroport ?

Revoir le scénario

Comment réécrit-on le scénario ? Chaque acteur va devoir faire son bout, à commencer par les gens de l’ADM. Comment un projet de gare a-t-il pu passer de 250 millions à 600 millions en moins de deux ans ? Quand on leur pose la question, on se fait dire que le budget actuel comprend non seulement la station, mais aussi tout ce qui l’accompagne : la liaison avec l’aéroport, les stationnements, etc.

Ça reste pas mal flou et pour aller chercher l’adhésion de tout le monde, ADM va d’abord devoir présenter un projet solide, transparent et justifier la facture « balloune ». Déjà, la Banque de l’infrastructure du Canada se montrerait plus attentive.

Le gouvernement fédéral, de son côté, devra être plus clair quant à ses intentions. Il y a moins de trois mois, on s’attendait à ce qu’Ottawa devienne le seul prêteur d’ADM.

Puis, à la mise à jour économique de Chrystia Freeland, on a appris qu’une somme de 500 millions serait accordée à l’ensemble des aéroports du pays. Une partie ira à l’aéroport de Montréal, mais on ignore le manque à gagner exact. Selon diverses sources, il oscillerait entre 60 et 400 millions. Il y a là toute une marge.

Finalement, Québec devra aussi se montrer de bonne foi. Répéter ad nauseam que l’aéroport est une infrastructure fédérale n’aidera personne. Parce que si la station ne voit pas le jour, ce sont d’abord et avant tout les Québécois qui seront affectés par l’absence d’un accès rapide à l’aéroport, mais aussi parce que le REM – cet immense projet de métro léger orchestré par la Caisse de dépôt et placement du Québec – perdra des revenus.

Espérons que tout ce beau monde fera de son mieux pour remplacer la fin en queue de poisson du train de l’aéroport de Mirabel par une fin joyeuse. En pleine pandémie, ça ferait le plus grand bien.

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