Après un long silence qui commençait à ressembler à de la bouderie, Denis Coderre a finalement annoncé ce que tout le monde pressentait : il quitte la vie politique. Il ne siégera donc pas comme chef de l’opposition à la Ville de Montréal. 

C’est une sage décision.

M. Coderre nous avait assurés, en rencontre éditoriale, qu’il avait envie de rester. Mais personne n’était dupe : il rêvait de diriger une métropole. Point.

Et si on se fie au ton de la campagne qui s’est terminée dimanche dernier, sa présence au conseil municipal aurait créé un climat peu propice à la collaboration. Or en politique municipale, une certaine collaboration est la clé de voûte du bon fonctionnement d’une ville.

Il suffit d’avoir suivi la scène municipale à Longueuil au cours des dernières années pour s’en convaincre. Face à une opposition majoritaire et surtout, hostile, la mairesse Sylvie Parent n’avait pas les coudées franches et son mandat a été marqué par plusieurs affrontements. Les citoyens de Longueuil ont assisté, impuissants, à un théâtre désolant.

L’exemple de Longueuil ne signifie pas qu’il n’y a pas de place pour l’opposition dans les conseils de ville. Au contraire. Mais elle s’exprime de manière différente que sur les scènes provinciale et fédérale. Cela s’explique d’abord par le fait qu’il existe peu de partis politiques organisés sur la scène municipale. Les partis sont souvent des coquilles vides autour d’une personnalité candidate. La coquille se craquelle rapidement en cas de défaite.

Au conseil municipal, l’opposition joue un rôle de chien de garde. Elle bénéficie d’un budget et d’un personnel politique pour fouiller des dossiers et poser des questions. Mais elle peut aussi se rallier au parti au pouvoir sur certains enjeux. À Québec, le nouveau chef de l’opposition, Claude Villeneuve, a déclaré qu’il travaillerait en équipe avec le nouveau maire, Bruno Marchand. Et il n’a pas fermé la porte à l’idée de siéger au comité exécutif si invité. Ce qu’avait accepté Richard Bergeron, fondateur de Projet Montréal, qui avait accepté de joindre le parti du maire Coderre en 2016, estimant sans doute qu’il ferait davantage bouger les choses de l’intérieur.

Si on se fie à l’attitude de M. Coderre à l’endroit de Valérie Plante tout au long de la campagne – il n’a même pas daigné l’appeler pour la féliciter comme le veut la tradition –, on l’imagine mal piler sur son orgueil et tendre la main à son adversaire.

Qu’on nous comprenne bien. Il n’est pas interdit d’être grognon dans la vie. Et on peut avoir un style combatif en politique si cela nous chante. Mais quand on annonce à grand renfort de publicité un changement en profondeur, on crée des attentes. M. Coderre avait convaincu bien des Montréalais de lui accorder une deuxième chance. À la fin, sa conception élastique de l’éthique et son manque de transparence à propos de ses contrats passés ont fait de lui l’artisan de son propre malheur.

Il laisse derrière lui un parti amoché. Ensemble Montréal a beau avoir fait élire six maires d’arrondissement, l’organisation – qui occupera 23 des 65 sièges au conseil municipal – a perdu de gros morceaux, dont son chef des dernières années, Lionel Perez. Cette coalition devra se reconstruire si elle veut survivre jusqu’aux prochaines élections.

Cela dit, il faut remercier M. Coderre pour sa contribution au débat public. Il n’a pas compté ses heures durant la campagne et il a proposé de bonnes idées. Certaines de ses propositions – sur la sécurité publique notamment – ont même forcé Valérie Plante à se repositionner.

On ne sait pas exactement ce qui s’est dit entre les murs de la Casa Italia, où il rencontrait son équipe, vendredi matin, mais une chose est certaine : Denis Coderre ne se représentera plus à la mairie de Montréal.

On lui souhaite bonne chance pour la suite.

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