Dany Turcotte, Ingrid Falaise, Pierre Curzi… Des personnalités publiques accompagnaient le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, dimanche lors de l’annonce du cours Culture et citoyenneté québécoise, pour dire tout le bien qu’elles en pensent.

Pendant cette conférence de presse, on a aussi diffusé une pub où l’on voit près d’une dizaine de ministres en vanter les mérites.

La pub se termine avec un François Legault enthousiaste, qui affirme qu’on « doit transmettre à nos jeunes plus de connaissances sur ce qu’on est comme Québécois, sur notre histoire, sur notre culture, sur notre façon de vivre ensemble ».

N’ajustez pas vos appareils.

C’est à la disparition du cours Éthique et culture religieuse (ECR) qu’on est en train d’assister. Mais c’est aussi à un véritable coup de marketing politique sur le thème de la fierté nationale.

L’évènement, donc, a été politisé à outrance.

Malaise : l’école n’a pas à servir de théâtre pour la CAQ qui prépare sa prochaine campagne électorale.

Par contre, ça ne signifie pas que le cours sera, lui, politisé.

En fait, on n’en connaît pas encore la teneur.

Pour cette raison, on aura tout avantage pour l’instant à faire preuve de prudence et de nuance.

Le fait est qu’on a dévoilé uniquement les trois axes de ce cours : culture, citoyenneté québécoise ainsi que dialogue et pensée critique.

On ne connaît donc que les intentions du gouvernement et non la façon dont elles se traduiront quant au contenu pédagogique. La rédaction du programme d’études est en cours et on veut l’implanter dans certaines écoles dès septembre 2022.

Il est tout de même déjà possible d’énoncer certaines vérités, tout en formulant des espoirs et en exposant des craintes.

En commençant par admettre que le cours ECR était mûr pour être révisé.

Ses faiblesses sautaient aux yeux depuis plusieurs années.

La culture religieuse y prenait beaucoup de place, au contraire de doctrines comme l’athéisme. Et on y a parfois prodigué un enseignement où le regard critique vis-à-vis des religions n’était pas toujours assez prononcé.

Par ailleurs, des manuels utilisés étaient archaïques, allant parfois « jusqu’à partager des préjugés à l’égard des femmes ou de certaines communautés », a souligné le ministre.

Une révision était donc nécessaire… mais pas nécessairement une rupture.

Le cours ECR a été diabolisé au cours des dernières années, mais le fait est qu’il faisait œuvre utile.

Réfléchir sur des questions éthiques, par exemple, était une de ses grandes forces. Tout comme l’accent mis sur l’apprentissage de la pratique du dialogue et des conditions qui le permettent.

ECR permettait à la fois de développer l’esprit critique de nos jeunes et de leur offrir une formation visant la compréhension historique et culturelle du phénomène religieux.

On comprend que toute la partie éthique va demeurer et sera actualisée. Il n’y a donc pas de rupture sur ce point, et c’est une excellente nouvelle.

L’importance de l’axe sur la citoyenneté québécoise, qui va inclure l’éducation à la sexualité – qu’on a du mal à caser depuis qu’elle est de retour au programme – et l’éducation aux médias, est également louable.

Pour autant, bien sûr, qu’on ne tente pas d’inculquer à nos enfants des notions de chauvinisme, pour paraphraser la vice-première ministre Geneviève Guilbault. L’étroitesse d’esprit n’a pas sa place dans ce cours, comme le ministre Roberge l’a d’ailleurs démontré en expliquant ses objectifs.

Ce qui n’est pas clair, c’est la place qu’occupera l’enseignement de la culture religieuse.

On comprend que la CAQ est le parti de la loi sur la laïcité. Mais laïcité et enseignement de la culture religieuse peuvent aller de pair.

« Évidemment, quand on va parler des cultures des différentes sociétés, il va falloir parler un peu des différentes religions », nous a expliqué le ministre en entrevue. Tant mieux.

Voyons voir maintenant comment le sujet sera abordé. On ne peut comprendre ni le monde d’aujourd’hui ni la société québécoise et ses défis contemporains sans comprendre le fait religieux. L’éducation au pluralisme demeure fondamentale.

Trop restreindre l’étude du phénomène religieux serait contre-productif. Si on veut s’entendre, il faut se comprendre. Ce qui n’exclut pas une approche critique des religions.

Un dernier souhait, en terminant : évitons d’agir précipitamment.

De l’avis de divers experts, ce fut l’un des problèmes d’ECR. On n’a pas laissé le temps aux enseignants de s’approprier la nouvelle matière. Ou d’obtenir des manuels conçus de façon exemplaire.

Fera-t-on mieux cette fois ?

Pour ça, il faudrait que le gouvernement caquiste privilégie une implantation méticuleuse du nouveau cours plutôt que le désir de se vanter, lors de la prochaine campagne électorale, de son déploiement rapide.

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