Investissements majeurs dans une aviation plus verte et plus durable. Création de 1000 emplois « payants ». Nouveaux programmes pour les PME. Deux premiers ministres contents qui se tutoient. Des ministres tout sourire.

Oui, il n’y a pas à dire, c’était la fête jeudi au Palais des congrès où Justin Trudeau et François Legault ont annoncé qu’ils délient les cordons de la bourse pour l’industrie aéronautique.

C’est une excellente nouvelle. Ce secteur, qui est l’un des fleurons de Montréal, a besoin de vent dans les ailes pour se remettre des turbulences de la pandémie. Il est essentiel que les 40 000 emplois qui y sont reliés tiennent le cap et que les milliers de mises à pied des 17 derniers mois ne soient plus qu’un mauvais souvenir.

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Il y a cependant un angle mort dans l’annonce de jeudi. On a parlé de recherche, de développement, de construction d’hélicoptères et de moteurs hybrides, mais on a bien peu parlé du cousin germain de l’aéronautique, le transport aérien.

Oui, le gouvernement Trudeau a déjà annoncé de l’aide pour les compagnies aériennes. Les ententes ont mis plus de temps à venir qu’aux États-Unis et en Europe, mais elles ont été conclues au printemps. Les compagnies aériennes ont aussi eu droit à des subventions salariales.

Fort bien, mais cet argent est loin de régler tous les problèmes. Les compagnies aériennes, tout comme l’industrie touristique, demandent au gouvernement de Justin Trudeau de présenter un plan clair pour la réouverture des frontières – terrestres et aériennes. Après de longues semaines d’attente, les réponses ont commencé à arriver jeudi soir. Le premier ministre canadien a pu discuter de son plan de match avec ses homologues provinciaux.

Si la vaccination continue d’aller bon train, le Canada pourrait rouvrir sa frontière aux Américains à la mi-août et aux autres voyageurs internationaux début septembre, a-t-on appris en fin de soirée. On est loin de connaître tous les détails de ce plan de réouverture, mais voilà une première ébauche qui permettra enfin aux compagnies aériennes de planifier les mois à venir, habituellement parmi les plus achalandés et lucratifs de l’année.

Mais on ne peut ignorer que ces annonces tardives ont eu un impact : alors que les États-Unis ont récupéré 75 % de leur trafic aérien international pré-pandémie, le Canada n’en est qu’à 18 %. Il y a là un gouffre.

Et il y a d’autres conséquences. En début de semaine, on apprenait que l’Association du transport aérien international (IATA), qui a son siège social à Montréal, compte réduire ses effectifs chez nous tout en bonifiant son bureau de Genève. Près de 300 emplois sont en jeu.

IATA, qui représente 293 compagnies aériennes des quatre coins du monde, affirme que sa décision n’est pas liée aux récentes décisions du gouvernement canadien, mais ne cache pas que les longs délais dans la réouverture des frontières n’aident pas la cause. D’ailleurs, IATA ne s’était pas gênée le mois dernier pour demander sur Twitter comment le Canada pouvait justifier que la levée de quarantaine ne s’applique qu’aux Canadiens doublement vaccinés et non pas à tous les voyageurs qui ont reçu deux doses.

À Ottawa, l’annonce d’IATA devrait faire apparaître une lumière rouge sur le tableau de bord du premier ministre. Forte du siège de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) et de 11 autres organisations internationales, dont IATA, qui gravitent autour de l’agence onusienne, Montréal est actuellement la capitale mondiale de l’aviation. On l’oublie trop souvent.

En plus d’être responsables de plus de 1000 emplois, ces organisations génèrent des retombées économiques de plus de 350 millions par année. Ce n’est pas négligeable, et le gouvernement de Justin Trudeau, qui disait pas plus tard que jeudi que « l’avenir de l’aérospatiale » est à Montréal, a tout intérêt à être attentif et à proposer un plan de match bien pensé pour s’assurer que ces organisations ne s’envoleront pas vers d’autres cieux. La pandémie a déjà fait assez de dégâts dans les airs comme sur terre.

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