Le dossier de Nathalie Collard publié dans le cahier Contexte de dimanche sur le marché du travail, notamment quant à l’influence des jeunes, a suscité de nombreux commentaires. Voici un aperçu des courriels reçus.

La certitude de se trouver un emploi

Votre interlocutrice affirme que « les jeunes ont plus de tolérance à l’insécurité » (que leurs parents, par exemple)… Je me demande dans quelle mesure le fait d’être certains de se trouver un emploi illico, s’ils délaissent le leur, y contribue. Les générations précédentes ont connu de graves récessions, des taux de chômage et d’intérêt élevés…

Mireille Dubé, Québec

La pression de l’ambition

Je ne suis plus jeune, à 53 ans. J’ai carburé aux défis toute ma vie. Dessinateur mécanique de formation, j’ai été représentant industriel pendant 30 ans. C’est payant, et les offres affluent constamment. Pourtant, un ancien employeur m’a offert de revenir comme soutien technique (interne) aux jeunes vendeurs externes qui prennent peu à peu le relais des nombreux retraités. Mes revenus sont 20 % moins élevés, mais en retranchant mes dépenses (même si certaines étaient remboursées), mes revenus nets ne sont pas bien plus bas. Et, probablement plus que jamais depuis mes débuts, je me sens vraiment sur mon X. Fini la pression liée aux objectifs de vente, aux rencontres aux quatre coins du pays, aux éternels démarchage, et j’adore mon rôle de coaching ! Je laisse aux jeunes affamés de succès la pression qui vient avec l’ambition.

Alan Charles

La concurrence de l’étranger

Ils ont une plus grande tolérance à l’insécurité ? Pas si sûr de ça. Ils sautent (les jeunes) d’un emploi à l’autre parce qu’ils savent parfaitement qu’il manque d’employés partout. Est-ce que cette situation durera pour toujours ? Fort probablement pas. Un jour, l’économie va se resserrer et ils seront moins insouciants. En particulier quand ils auront une hypothèque et au prix où l’immobilier est rendu, les hypothèque ne laissent aucune marge de manœuvre. Un mois, ça passe très vite. Un autre facteur qui n’est pas abordé dans cet article : j’ai un ami aux ressources humaines d’une grande banque canadienne. Ils perdent de plus en plus leurs employés, ceux-ci étant recrutés par des institutions financières américaines. Voyez-vous, avec le télétravail, rien n’empêche une entreprise d’un autre pays d’embaucher, en télétravail, un employé qui réside dans un pays où la valeur de l’argent est moindre et les salaires plus bas (sans compter qu’ils n’ont pas à payer les grosses primes d’assurance maladie, l’employé étant couvert par le régime de l’assurance maladie du Québec). De grosses industries (qui coûtent très cher à déménager) ont quitté les pays du Nord pour s’installer dans des pays où la main-d’œuvre est moins chère. Vous pensez que lorsqu’il s’agira simplement d’une ligne internet, il n’y aura pas de pertes massives de postes ici ? Et si vous pensez que ce ne sera pas possible parce que les gens ailleurs seraient moins scolarisés, vous êtes probablement raciste. Tout s’apprend. Ici ou ailleurs. Enlevez vos lunettes roses.

Pierre Lavigne

Évolution sociale

Ce phénomène, accéléré par la pandémie, est aussi un facteur de changement dans d’autres sphères d’activité. On n’a qu’à penser au monde de l’éducation, par exemple, qui doit composer avec les milléniaux maintenant et qui a dû s’adapter aux générations X-Y, etc. Ces générations mieux informées et plus diplômées ont des revendications et exigences qui n’étaient pas envisageable par les boomers, et ce, dans tous les domaines, qu’ils soient économique, spirituel, familial, politique, des communications, etc. Les dirigeants, y compris les politiciens élus, doivent tenir compte des manifestations de cette évolution sociale que l’on doit aux Paul Gérin-Lajoie de ce monde et dont la vision d’un monde meilleur est en voie d’actualisation.

Gaston M. Côté

Ce qui a changé

Je suis nouveau retraité et j’ai eu la chance de côtoyer jeunes et moins jeunes en cours de carrière. Selon moi, le profil du travailleur a peu changé au fil des 35 dernières années : il y en a des bons et des moins bons à chaque génération. Des employés engagés travaillant en équipe, mobilisés par les objectifs, des agents de changement voulant améliorer les choses à tous points de vue (santé/sécurité, qualité, productivité, rentabilité). Et à l’autre extrême, des travailleurs toujours à la recherche du moindre effort, critiques constants de leur travail, de leurs collègues et des patrons, qui réussissaient à conserver leur emploi en se faufilant à travers les mailles du filet ou simplement en raison de la présence de mauvais gestionnaires.

Ce qui a changé au fil du temps est la pénurie de main-d’œuvre qui permet aux travailleurs d’aujourd’hui de négocier de meilleures conditions sans pour autant avoir le devoir de vraiment performer, en plus de l’avènement des réseaux sociaux dans l’exercice du travail. J’ajouterais à cela une incompétence grandissante des gestionnaires qui sont tellement absorbés par leurs tâches administratives (et leurs propres réseaux sociaux), qu’ils ont oublié leur raison d’être, c’est-à-dire prendre soin de leur personnel et de leur environnement de travail, être à leur écoute, afin que les employés performent à la hauteur des attentes. La fidélisation envers l’employeur a également disparu, situation créée par l’employeur en abandonnant les régimes de pension à prestation déterminée en plus de réduire ses investissements pour développer son personnel (leur potentiel d’avancement) et améliorer l’environnement de travail.

Réal Bilodeau

Lisez le dossier de Nathalie Collard, « Révolution au travail »