En politique, on n’est jamais plus fort qu’au lendemain d’une réélection. Parce qu’on n’entendra plus jamais dire qu’on est un accident de parcours. Mais surtout parce qu’on est clairement aux commandes pour quatre ans. Pour tous les autres politiciens, cela imposera un certain respect et, surtout, une obligation d’écoute.

Mais la réélection ne garantit rien en soi. René Lévesque fut réélu facilement après un premier mandat spectaculaire pour ses réalisations. Il aura connu un second mandat calamiteux…

Reste que pour la mairesse Valérie Plante – et pour Montréal –, ce mandat ouvre de belles possibilités alors que la ville sort de la pandémie et retrouve un certain élan. Voici donc, bien modestement, quelques suggestions de priorités.

Profiter au maximum de la nouvelle dynamique municipale

Tout le monde l’a noté, le monde municipal a changé – pour le mieux – à la faveur des dernières élections. On a des maires plus verts, plus progressistes et plus de femmes. Montréal doit être au-devant de cette dynamique de changement.

On a vu pendant la campagne électorale des initiatives très intéressantes, comme quand les candidats qui se sont avérés victorieux à Laval et à Longueuil ont présenté une action commune sur le logement.

Cette alliance des troisième et cinquième villes du Québec deviendrait vite incontournable si la plus grande ville du Québec s’y joignait, avec un effet d’entraînement certain sur d’autres villes.

Une telle alliance pourrait aussi permettre de retrouver une certaine force du monde municipal vis-à-vis du gouvernement du Québec qui a – quel que soit le parti au pouvoir – toujours tendance à considérer les villes comme ses « créatures ».

En particulier, cela pourrait donner un nouveau souffle à une réforme du financement municipal qui traîne depuis des décennies. Tout le monde convient que la taxe foncière ne doit plus être pratiquement la seule source de financement des villes, il est plus que temps d’une réforme.

Revoir de fond en comble le projet de REM de l’Est

L’est de Montréal a besoin de plus de transports en commun, mais il n’a pas nécessairement besoin du REM. Plus précisément, l’est de Montréal n’a pas besoin d’un nouveau lien avec le centre-ville – qui n’est dicté que par le modèle d’affaires du promoteur du projet, CPDQ-Infra.

Le lien avec le centre-ville, il existe déjà, c’est la ligne verte du métro qui a toujours de la capacité excédentaire à l’est de Berri-UQAM. Le véritable besoin, il se situe à l’est et au nord de la station Honoré-Beaugrand où des secteurs complets sont enclavés, en particulier Rivière-des-Prairies, un quartier auquel on a fait beaucoup de promesses jamais tenues.

Ce REM va, en plus, dédoubler des infrastructures existantes ou en construction. En plus de la ligne verte du métro, on parle ici du SRB Pie-IX et du train de banlieue de la ligne Exo 5 qui dessert Repentigny, Terrebonne et Mascouche.

De plus, l’est de Montréal n’a aucun besoin de ce désastre de design urbain qu’est le REM, maintenant qu’on peut voir dans l’Ouest-de-l’Île à quoi ressemblent ces pylônes de béton. Pas étonnant que des citoyens de ces quartiers se mobilisent contre le projet.

Comme ce REM se déploierait presque entièrement sur le territoire de la Ville de Montréal, il faut que l’administration municipale devienne autre chose qu’un spectateur ou un investisseur qui ne peut qu’adapter ses infrastructures au projet de CPDQ-Infra.

Investir dans les (grands) parcs

La pandémie l’a montré, les parcs de Montréal – et plus particulièrement les grands parcs – sont la seule cour de milliers de Montréalais. Au cours des derniers mois, la fréquentation des grands parcs a été multipliée par trois.

PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE

Le parc Angrignon

Pourtant, ces parcs ont besoin d’amour et, dans certains cas, d’investissements majeurs et urgents. Évidemment, les besoins sont infinis et les budgets ne le sont pas. Mais on a souvent l’impression qu’à Montréal, les parcs passent en dernier. Une brève promenade au parc Angrignon – un exemple parmi d’autres – suffira à vous convaincre…

Créer un fonds de prévoyance pour les infrastructures

Il y a quelques années, le gouvernement du Québec a obligé les propriétaires de condos à avoir des fonds de prévoyance plus substantiels. Il est temps que les municipalités – et au premier rang, Montréal – fassent de même pour leurs infrastructures.

Il existe au gouvernement du Québec un tel fonds pour les municipalités, mais seulement pour l’eau. Montréal devrait se doter d’un fond pour les autres infrastructures, avec la participation nécessaire des gouvernements supérieurs.

D’autant que les infrastructures bâties tout de suite après la Seconde Guerre mondiale vont bientôt avoir besoin d’investissements majeurs. Le temps d’agir, ce serait maintenant.

Dès 1993, Jean Chrétien avait misé sur un programme d’investissement dans les infrastructures municipales pour relancer l’économie. Stephen Harper avait fait de même en 2009. Il est sans doute temps de militer pour une telle initiative à nouveau.