Le document sur la transition énergétique dévoilé cette semaine par le gouvernement du Québec est présenté comme un « plan d'action ». Malheureusement, il relève davantage du texte religieux que de la feuille de route qui permettrait au Québec de faire enfin le virage vers une économie faible en carbone.

Efficacité énergétique, soutien aux voitures électriques, ajout de biocarburants à l'essence : prises individuellement, les 42 mesures que contient le plan peuvent sembler logiques pour réduire notre dépendance au pétrole. Le problème, c'est que l'impact de chacune d'entre elles n'est pas chiffré.

Deux autres plans devraient suivre d'ici 2030. Le ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles nous promet qu'ensemble, ils permettront de réduire de 40 % la consommation de pétrole au Québec. Mais sans démonstration, il s'agit d'un acte de foi qu'on demande aux Québécois de faire.

Il faut d'ailleurs une solide dose de ferveur religieuse pour croire en cet objectif. La réduction visée est si colossale qu'on voit mal comment les moyens proposés pourraient permettre de l'atteindre. 

Québec, par exemple, réitère un vieil objectif de mettre 100 000 voitures électriques sur les routes d'ici 2020 avec son programme d'incitatifs financiers. Même si l'objectif était atteint, on parle d'environ 2 % du parc automobile actuel - un parc qui, par ailleurs, a grossi de 7 % depuis 5 ans. Même chose pour les 400 000 millions de litres de biocarburants promis annuellement pour 2020, qui représentent moins de 3 % de la consommation totale de carburant.

Pour l'instant, les moyens ne correspondent donc pas aux objectifs à long terme. Le gouvernement le reconnaît en affirmant viser une réduction de la consommation de pétrole de seulement 6 % d'ici 2020. Si on veut atteindre la cible de 40 % d'ici 2030, il faudra donc faire 85 % des efforts au cours des dix dernières années. Et pour ça, on n'a pas l'ombre d'un plan.

L'autre grande lacune de ce plan d'action est qu'il ne détaille pas l'impact de chaque mesure sur les émissions de gaz à effet de serre. Le Ministère affirme que l'ensemble du plan permettra de réduire ces émissions de 18 % sous les niveaux de 1990. Mais encore ici, le chiffre sort d'un chapeau et n'est pas ventilé.

« La politique énergétique est une politique de transition énergétique et non une politique de réductions de GES », plaide-t-on au cabinet du ministre Pierre Arcand. Quand on sait que le premier objectif de la politique énergétique est de « privilégier une économie faible en carbone », on se serait attendu à davantage de cohérence.

Ces propos sont aussi une illustration patente du problème de gouvernance qui plombe la lutte contre les changements climatiques au Québec. Le plan pour atteindre les ambitieuses cibles de réduction de GES fixées par Québec relève du ministère de l'Environnement. Mais c'est le ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles qui pilote le morceau crucial qu'est la transition énergétique. C'est sans compter l'organisme Transition énergétique Québec, nouvellement créé, dont la mission est aussi de gérer la transition énergétique... et qui doit aussi accoucher de son propre plan directeur en octobre. Vous n'êtes pas seul à ne plus vous y retrouver. « Je ne comprends rien », laisse tomber Pierre-Olivier Pineau, expert en énergie à HEC Montréal.

Les Québécois sont en train de perdre la foi dans la capacité du gouvernement Couillard à atteindre ses cibles environnementales. C'est avec des plans clairs et chiffrés, non une multiplication de voeux pieux, que celui-ci pourra les convaincre de son sérieux.

Les objectifs de la politique énergétique 2030

• Améliorer de 15 % l'efficacité énergétique

• Réduire de 40 % la quantité de produits pétroliers consommés

• Éliminer l'utilisation du charbon thermique

• Augmenter de 25 % la production d'énergie renouvelable

• Augmenter de 50 % la production de bioénergie

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