Il y a quelque chose que les partis n'osent pas dire trop fort au sujet des CHSLD : ce ne sera jamais l'endroit idéal pour vieillir.

La Coalition avenir Québec promet de convertir les futurs CHSLD en « Maisons des aînés ». Mais la maison idéale pour vieillir, c'est sa propre maison. Et pourtant, il en est encore peu question dans cette campagne électorale.

Dans les dernières années, les CHSLD sont devenus le symbole de l'indigence des services publics. L'opposition a utilisé les « patates en poudre » et le manque de bains pour attaquer le gouvernement libéral. C'est donc par là qu'elle commence avec ses promesses électorales, en repensant les centres qui seront construits à partir de 2022.

Les CHSLD ont été créés dans les années 70. On voulait convertir des lits d'hôpitaux pour héberger les personnes âgées en perte sévère d'autonomie.

Ce n'est donc pas le premier choix. C'est l'endroit où l'on va quand on ne peut plus aller ailleurs.

Même si tout doit être fait pour y offrir le passage le plus digne, cela ne constitue pas une réponse suffisante au vieillissement de la population. Car l'essentiel est ailleurs.

À l'heure actuelle, moins de 4 % des personnes âgées y sont hébergées. Cela peut sembler très peu, mais c'est énorme. Un patient sur quatre y séjourne même si son niveau d'autonomie ne le requiert pas. Et plus le temps avance, plus cela deviendra un problème.

La demande va exploser, alors qu'il manque déjà de places, d'employés et de soins.

Au-delà du pseudo-scandale de patates en poudre, la détresse humaine dans les CHSLD existe bel et bien. La preuve : la troublante action collective intentée en juillet par le Conseil pour la protection des malades.

Bien sûr, il n'y a rien de mal à ce que la Coalition avenir Québec réimagine les prochains centres qui seront construits à partir de 2022. Mais il y a urgence d'agir maintenant.

En recrutant plus de préposés aux bénéficiaires et autres employés - ce qui exige de leur offrir des conditions de travail décentes. Et en aidant les gens à rester chez eux lorsque c'est leur choix.

C'est dans les CHSLD que les soins pour les personnes âgées coûtent le plus cher. Or, le Québec y concentre l'essentiel de ses dépenses pour les aînés - plus de 80 %. Au Danemark et dans d'autres pays vieillissants, le contraire s'observe : la majorité du budget va au maintien à domicile.

Bref, le virage maison se justifie autant par des raisons humaines que financières. Les caquistes et les péquistes le comprennent bien, mais ils n'en parlent pas beaucoup. Peut-être parce que c'est moins vendeur pour les bulletins de nouvelles. Pourtant, l'opposition a de très belles munitions pour attaquer le bilan libéral...

L'année dernière, le Protecteur du citoyen dénonçait le « nivellement par le bas » du gouvernement Couillard. Son constat était sévère : les libéraux ne respectent pas leurs engagements.

Dans leur plan 2015-2020, les libéraux s'engageaient à hausser de 15 % le nombre d'aînés recevant des services à domicile. Mais à leur première année, ils ont réduit ce nombre de près de 1 %. Ils devaient aussi hausser la durée des soins offerts par personne, mais ils ont fait le contraire avec leurs nouveaux critères plus restrictifs d'évaluation des besoins.

Hélas, il n'y a rien de neuf. En santé, on coupe toujours dans ce qui est moins visible, comme la prévention et les soins de première ligne. Or, ce n'est pas parce que c'est moins visible que ça fait moins mal.

En 2014, le ministre péquiste de la Santé, Réjean Hébert, proposait une assurance autonomie, inspirée entre autres par le Japon, la France et l'Allemagne. L'État aurait aidé les Québécois à cotiser durant leur vie active pour se payer des soins à domicile si nécessaire après leur retraite.

Il est vrai que lancer un tel modèle aurait coûté très cher. Trop cher, soutenaient les libéraux. Mais à tout le moins, la proposition avait le mérite de parler du coeur du problème. Comment faire mieux ? C'est la piste qu'on aimerait que les partis explorent d'ici la fin de la campagne.

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De 15 à 18 % des aînés ont besoin de services à domicile.

8,6 % en reçoivent.

Source : Rapport annuel du Protecteur du citoyen, 2017

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« L'offre de services tend à un nivellement vers le bas. Des personnes ont vu leurs heures de services coupées, alors que leurs besoins n'avaient pas diminué. Cela n'est pas acceptable. »

- Marie Rinfret, protectrice du citoyen, 28 septembre 2017

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