L'actualité politique justifie de faire une petite balade au cimetière des rapports pour déterrer, si on peut le trouver parmi tous les autres, celui sur les nominations partisanes.

Il y a une dizaine de jours, l'émission Enquête a révélé de troublantes allégations de fraude de plusieurs millions de dollars à la Société immobilière du Québec (SIQ), dont les administrateurs ont au mieux été induits en erreur.

L'histoire se déroulait il y a une décennie. Ces administrateurs étaient « une bande de pas bons », a étrangement déclaré l'ex-ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget. C'est pourtant elle qui les avait nommés !

Pourquoi avoir choisi des gens dont elle doutait de la compétence ? La loyauté au parti ne leur a pas nui...

Tous les membres du conseil d'administration nommés après 2003 étaient liés au Parti libéral du Québec ou à leurs grands collecteurs de fonds, Charles Rondeau et Franco Fava.

De tels dérapages seraient beaucoup plus difficiles aujourd'hui. Comme l'a rappelé avec raison le premier ministre Couillard, l'influence de l'argent a été grandement réduite. Le plafond des dons a été baissé (de 3000 à 100 $), tout comme celui des dépenses électorales. Il s'agit du régime le plus strict au pays, et de loin.

Par contre, rien n'a été fait pour les nominations partisanes. Un rapport rigoureux sur le sujet avait pourtant été déposé au gouvernement Marois en 2013.

Chaque candidat à un poste aux emplois supérieurs devrait faire l'objet d'une évaluation indépendante, y lisait-on. Cela exigerait de changer la Loi sur la fonction publique. Selon ce rapport, cette mesure se justifiait à cause de la légère hausse des nominations partisanes, qui peuvent causer une « perte d'efficacité » à cause de « patrons non compétents ».

Au total, le rapport comptait 12 recommandations. Il suggérait entre autres de mettre fin aux indemnités de départ ou de transition pour les hauts fonctionnaires qui démissionnent avant la fin de leur mandat. Aussi, le gouvernement ne devrait plus renouveler un mandat plus de trois mois à l'avance ou durant une campagne électorale.

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Le terme nomination partisane ne doit pas être galvaudé. Un haut fonctionnaire ou administrateur ne se disqualifie pas parce qu'il a déjà milité dans un parti. Cela ne devrait pas lui nuire. Et il est même légitime que cela l'aide pour certains postes névralgiques, comme celui de délégué général à New York ou Paris. Cette personne doit en effet appuyer les politiques du gouvernement qu'elle promeut à l'étranger.

Mais pour la majorité des postes d'administrateur comme à la SIQ, la couleur politique ne devrait ni aider ni nuire. La compétence doit primer.

Le gouvernement Marois n'a jamais donné suite au rapport, commandé pour étouffer la controverse liée à la double nomination d'André Boisclair. M. Couillard lui non plus n'a pas voulu changer la loi.

À sa décharge, les récentes nominations n'ont pas été controversées. Mais les dérapages restent possibles, car il manque encore des garde-fous pour empêcher l'habituel jeu de chaises musicales entre vieux partis, qui tolèrent les choix de leurs rivaux en sachant qu'ils pourront les dégommer dès leur arrivée au pouvoir.

Au lieu de prendre ce risque, pourquoi ne pas souffler la poussière sur le rapport Perreault ?

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