Le conflit actuel autour de la couverture des échographies effectuées par les radiologues en cabinet privé est l'exemple typique d'une négociation qui ne devrait pas avoir lieu sur la place publique. Comme toujours en santé, chacun des camps se drape dans l'intérêt de la population. Il y a du vrai là-dedans, évidemment, mais si l'intérêt public était vraiment la priorité, on se serait entendu pour rendre le service disponible avant d'en faire état.

En principe, les échographies effectuées dans les cliniques des radiologistes sont maintenant couvertes par votre carte d'assurance-maladie, et ce, depuis le 29 décembre dernier. En pratique, ces examens n'y sont pas accessibles puisque les radiologistes, insatisfaits des conditions offertes par Québec, ne donnent pas de rendez-vous.

Au lieu d'offrir le service, on offre le spectacle d'une querelle de plus en santé.

Dans ce cas-ci, l'affaire oppose le ministre de la Santé Gaétan Barrette à l'Association des radiologistes du Québec, mais ce n'est qu'une variante du même manège auquel on a trop souvent assisté au cours des dernières décennies. Qui a raison? Croire que tous les torts sont d'un côté, c'est déjà tomber dans le panneau.

Comme d'habitude, chacune des parties affirme défendre l'intérêt de la population. L'ennui, c'est que ça ne se résume pas à ça. Personne n'est désintéressé dans cette histoire. Chacun essaie, en même temps, de faire pencher la balance de son côté.

La promesse d'étendre la couverture du régime public aux échographies en clinique privée, qui remonte à la campagne de 2014, a suscité de grandes attentes : un accès sans frais comme au public, mais à la vitesse du privé.

Ça ne se passera pas aussi bien que ça, prévient l'Association des radiologistes. Surtout dans les premiers temps, quand les patients qui poireautaient sur les longues listes d'attente des hôpitaux se tourneront massivement vers les cliniques privées soudainement accessibles sans frais. Le scénario est plausible.

Il y aura sûrement de l'attente dans les cliniques aussi, et des patients fâchés, déçus ou inquiets de ne pas pouvoir passer l'examen aussi rapidement qu'ils s'y attendaient.

On peut donc comprendre que les radiologistes auraient préféré voir la couverture publique étendue progressivement, en priorisant certains types d'examens, pour faciliter l'intégration de la clientèle.

D'un autre côté, en tant que contribuables et usagers du système de santé, nous avons tout intérêt à ce que le ministre essaie d'en obtenir le plus possible avec son budget. (Il est d'ailleurs prévu que cette extension de la couverture publique soit financée à même l'enveloppe de rémunération déjà allouée à la Fédération des médecins spécialistes.) Le problème, ce n'est donc pas que le ministre tienne tête aux radiologistes. C'est qu'il ait annoncé le service avant d'avoir obtenu l'entente garantissant qu'il soit disponible.

Ça finira par se régler, comme toujours. Le ministre dit préférer une entente négociée mais à la limite, il aurait le pouvoir d'imposer un tarif. Et il assure que des cliniques seront très intéressées à offrir le service aux conditions qu'il propose. On veut bien le croire, mais fallait-il qu'on se tape tout ce cirque pour en arriver là? Fallait-il absolument que chacun fasse son numéro en tentant de mettre le public de son bord? Franchement, ce n'est pas sérieux. Et ça commence à être lassant.

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