Pouvoir consulter son dossier médical en ligne, comme on le fait avec son compte bancaire ? En Ontario, on s'étonne que ce ne soit pas encore la norme, et on s'engage à l'offrir bientôt. Au Québec ? On est encore loin du compte.

« Parce que j'ai vécu dans un monde entièrement numérisé visant à permettre aux consommateurs d'obtenir ce qu'ils veulent au moment où ils le veulent [...], il semble étrange que notre secteur probablement le plus important, notre système de santé, soit en retard », souligne l'ancien patron de la Banque TD, Ed Clark, dans son rapport publié la semaine dernière.

M. Clark avait le mandat d'évaluer la numérisation du système de santé ontarien et ses possibilités - bref, de jeter un oeil neuf sur ce chantier plutôt réputé pour ses délais et ses dépassements de coûts. On connaît les dérapages du Dossier Santé Québec (DSQ). L'Ontario a vécu pire encore, au point qu'un ministre de la Santé a dû démissionner en 2009.

Des investissements de grande valeur ont cependant été réalisés, et il est urgent de les compléter pour en tirer le plein potentiel, a fait valoir Ed Clark, en demandant que tous les Ontariens aient un accès en ligne pour voir leurs résultats et d'autres renseignements de santé, faire renouveler leurs ordonnances et prendre rendez-vous. Message reçu. Le ministre de la Santé, Eric Hoskins, a accepté toutes les recommandations, en soulignant l'importance « d'une stratégie qui place les patients au premier plan ».

Il faut dire que l'Ontario a une longueur d'avance. Près de 80 % des médecins de famille y utilisent des dossiers médicaux électroniques. C'est plus que la moyenne canadienne (73 %) et pas mal mieux que le Québec (60 %). Seuls le Nouveau-Brunswick et Terre-Neuve arrivent après nous (40 % et 36 % respectivement).

L'Ontario a aussi pu mesurer les avantages de l'ouverture. L'hôpital Sunnybrook a commencé à rendre des éléments du dossier clinique informatisé disponibles il y a déjà 10 ans. Une foule d'informations (résultats de tests, notes cliniques, listes de médicaments et d'allergies) et d'outils (prise de rendez-vous, questionnaires, procédures) sont aujourd'hui offerts en ligne. Autant de moyens d'améliorer la compréhension des patients et leur adhésion aux soins.

Si on compare les soins de santé à d'autres domaines comme le commerce de détail, les finances ou même l'éducation, un tel accès relève de l'évidence. Vu du Québec, malheureusement, ça ressemble à de la science-fiction.

Hormis quelques projets pilotes, les patients ne peuvent pas consulter leurs dossiers électroniques en ligne. Et pour voir les renseignements accessibles par le fameux DSQ (médicaments, imagerie médicale, résultats de laboratoire), il faut envoyer un formulaire par la poste ou par télécopieur...

Or, si seulement 20 % des Canadiens peuvent consulter leur dossier médical en ligne, presque tous les autres (69 %) voudraient pouvoir le faire, montre un sondage réalisé pour Inforoute Santé du Canada au printemps dernier. « C'est une chose à laquelle le ministre est favorable et à laquelle on travaille actuellement », nous dit-on au bureau de Gaétan Barrette.

C'est à souhaiter.

Le plus choquant dans la numérisation de notre système de santé, ce n'est pas tant son retard, qui est en train d'être rattrapé, que sa conception. Exclure le patient est une idée complètement dépassée, héritée d'une époque où celui-ci était considéré comme un cas, et non un participant actif aux soins. Il est temps d'arriver au XXIe siècle.

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